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Notre Père, Chemin d’unité de vie

Permettez-moi de commencer cet entretien sur le Notre Père, chemin d’unité de vie, par les paroles de Notre Seigneur : « Et il advint, comme il était quelque part à prier, quand il eut cessé, un de ses disciples lui dit : “Seigneur, apprends-nous à prier, comme Jean l’a appris à ses disciples.” Il leur dit : “Lorsque vous priez, dites : Père, que ton Nom soit sanctifié ; que ton règne vienne ; donne-nous chaque jour notre pain quotidien ; et remets-nous nos péchés, car nous-mêmes remettons à quiconque nous doit ; et ne nous soumets pas à la tentation”. » (Lc 11, 1-4)

Outre les interminables controverses d’exégètes sur les deux versions du Notre Père de saint Matthieu et de saint Luc, regardons ces textes avec la foi et l’amour qui cherchent à entrer dans le cœur de Dieu pour s’y réfugier et y vivre. Que voyons-nous ? Nous voyons des disciples en admiration devant Jésus qui prie son Père. Nous voyons un d’entre eux qui demande humblement au Maître de lui apprendre à prier, car il ne sait pas. Cette demande du disciple aimant est le fruit de son humilité, car il avoue ne pas savoir, et de son espérance, car il sait que Jésus va lui enseigner la prière la plus parfaite et ainsi lui permettre de s’approcher un peu plus du Père. Devant cette demande, Jésus livre son cœur ; Jésus livre son expérience humaine de la prière ; Jésus livre l’enseignement de la deuxième Personne de la Très Sainte Trinité pour nous permettre d’approcher du Père et ainsi connaître la joie de l’aimer par l’action de l’Esprit Saint.

De très nombreux saints ont essayé de réfléchir et de méditer sur le sens de cette prière du Seigneur. Ainsi Saint Thomas d’Aquin, à la suite de saint Augustin, considère le Notre Père comme la prière parfaite résumant tout l’enseignement du Christ sur la prière. Il a donc cherché à montrer l’importance et l’excellence de cette prière pour l’ensemble de la vie chrétienne. Il commence par expliquer que les sept demandes de l’Oraison dominicale sont l’expression parfaite de la recherche de la vie bienheureuse. Tout ce qu’on peut demander à Dieu est contenu dans cette prière. Toute la loi évangélique est contenue et est résumée dans les sept demandes de la prière du Seigneur.

Par la prière, on demande à Dieu la grâce, les dons du Saint Esprit pour pratiquer les vertus chrétiennes et ainsi vivre les sept béatitudes qui sont le véritable testament moral et spirituel de Jésus. De fait, dans chaque demande du Notre Père, nous demandons un don du Saint Esprit pour pratiquer une vertu et ainsi vivre une béatitude. La prière opère donc le lien entre la vie active (vie familiale, vie professionnelle, etc.) et la vie contemplative (vie spirituelle, les sacrements, la prière), entre l’agir et la relation intime de l’âme avec son divin Créateur. Par elle, nous laissons Dieu nous rejoindre et nous élever à lui en nous inspirant une conduite conforme aux desseins de la divine Providence. La prière permet ainsi de coopérer à l’œuvre de la grâce pour que Dieu puisse nous justifier, nous transformer de l’intérieur afin de nous préparer à jouir de sa vision dans la Gloire. Il est intéressant de visualiser la concordance dans un tableau.

Concordance Notre Père / dons / vertus / béatitudes

Notre Père

Dons

Vertus

Béatitudes

Notre Père qui es aux cieux

I. La fin

Que ton nom soit sanctifié

Crainte

Espérance

Béatitude des pauvres

Que ton règne vienne

Piété

Justice

Béatitude des doux

II. Les moyens

Que ta volonté soit faite

Science

Tempérance

Béatitude des larmes

Donne-nous notre pain

Force

Force

Béatitude des affamés de justice

III. Les obstacles

Pardonne-nous nos offenses

Conseil

Prudence

Béatitude des miséricordieux

Ne nous soumets pas à la tentation

Intelligence

Foi

Béatitude des cœurs purs

Mais délivre-nous du mal

Sagesse

Charité

Béatitude des artisans de paix

Tenter de voir la vie autrement, de chercher un chemin d’unité de vie, tenter d’envisager la morale et l’ensemble de la vie humaine avec l’Oraison dominicale semble ce qu’il y a de plus conforme à ce que l’on peut appeler la morale évangélique. Pourquoi ? L’homme reste toujours au centre de la morale. Néanmoins, conscient de sa nature créée à l’image et à la ressemblance de Dieu mais blessée par le péché, l’homme demande à son Père de l’aider et de l’éduquer à agir conformément à son être en vue de l’obtention de la vie éternelle. Plus nous prions la prière du Seigneur, plus notre âme est travaillée et transformée de l’intérieur par l’Esprit Saint pour nous permettre d’avancer sur le chemin étroit des béatitudes par la pratique des vertus.

La réorganisation de la morale à partir de l’oraison dominicale présente un autre avantage d’une extrême importance. La première demande étant reliée à la vertu d’espérance, toute la vie morale est désormais empreinte d’un optimisme intrinsèque extraordinaire, fondement d’une dynamique impressionnante. L’espérance, moteur du désir et de la prière, plonge l’âme dans une profonde humilité et dépendance vis-à-vis de Dieu, auteur de tout bien, sans lequel nous ne pouvons rien faire (Jn 15, 5). Par là même, nous entrons dans la béatitude des pauvres en esprit. De plus, face à nos blessures intérieures et à nos épreuves, la vertu d’espérance permet de dépasser un regard négatif sur la vie et sur nous-même puisque nous prenons du recul pour épouser le regard de Dieu sur sa création. De fait, l’espérance permet de vivre en ressuscité, confiant en la victoire du Christ sur nos péchés ; elle permet de vivre en fils adoptif d’un Père qui nous aime. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard que le démon cherche toujours en premier lieu à déstabiliser cette vertu pour faire tomber l’âme dans le péché et la couper de Dieu. C’est pourquoi la vertu d’espérance est ce moteur de la vie morale et spirituelle, qui permet de tirer tout notre être vers ce Dieu d’Amour que l’on ne considère plus comme un juge impartial condamnant les moindres écarts de conduite, mais comme un Père aimant et rassurant qui nous donne à chaque instant les moyens de se rapprocher de lui. À l’inverse, la peur paralyse l’âme et l’enferme sur elle-même, l’empêchant d’aimer Dieu et le prochain dans les moindres détails de sa vie. C’est bien là le drame de la société moderne où, entre autre, la consommation de psychotropes ne cesse d’augmenter pour fuir une dure réalité que l’on est incapable d’assumer, faute d’espérance en la miséricorde et l’amour de Dieu pour chacun d’entre nous. L’oraison dominicale est bien plus qu’une simple prière, c’est la prière parfaite recouvrant toute notre vie et nous éduquant à la perfection.

La logique de l’ordre des demandes se prend dans l’intention selon le principe, ce qui est premier dans l’intention est dernier dans la réalisation. L’intention, la fin fixée, permet de discerner les moyens à mettre en œuvre en vue de cette fin. C’est ainsi que les deux premières demandes concernent la fin et les autres, les moyens pour y parvenir. En effet, seul le bien est un principe éducateur conformément à la psychologie de l’acte humain. La raison conçoit le bien et le propose à la volonté pour qu’elle meuve les autres facultés en vue de son obtention. Ce ne sera que secondairement que la volonté en écartera les obstacles considérés comme des maux. C’est pourquoi, pour nous écarter du mal, il est d’abord nécessaire de s’attacher au bien et de vouloir l’atteindre, ce que propose le Notre Père dans un but éminemment pédagogique.

  1. Les demandes concernant la fin

L’oraison dominicale débute par Notre Père et commence ainsi le mouvement de la volonté selon l’ordre de la vertu de charité. En réponse à l’amour infini de Dieu, l’homme commence sa prière par un acte de foi, d’espérance et de charité. Ainsi, les premières paroles manifestent notre amour désintéressé pour Dieu, qui nous a appris à l’appeler Père. Dire Père à Dieu comporte une charge affective très forte. Dire Notre Père permet aussi de prendre conscience que nous sommes membres du Corps du Christ et que nous sommes fils dans le Fils ; notre salut, tout en étant personnel, est lié à celui de l’ensemble de l’Église (cf. Abel et Caïn). Nous cherchons à aimer Dieu pour ce qu’il est et nous l’appelons donc Père pour trois raisons : 1. il nous a créés à son image et à sa ressemblance. Dieu est auteur de la vie ; 2. il exerce continuellement sa sollicitude à notre égard par son gouvernement divin, Dieu maintient sa création constamment dans l’existence ; 3. il nous a adopté par son Fils : le baptême et le mystère de la Croix.

En l’appelant Père, nous confessons par là même toute notre foi, puisque nous le reconnaissons comme Créateur et Sauveur de l’humanité sans lequel rien ne peut subsister et dont nous espérons la Béatitude. Cela engendre de notre part une certaine attitude : 1. nous lui devons l’honneur qui lui est dû en justice en nous acquittant de nos devoirs envers lui, envers nous-même et envers le prochain ; 2. nous devons chercher à l’imiter par la charité, la miséricorde et la perfection ; 3. nous lui devons l’obéissance à l’image du Christ ; 4. nous devons être patients quand il nous corrige pour nous remettre dans le chemin de la vie bienheureuse.

Notre Père qui es aux cieux. La précision qui es aux cieux, prépare l’âme à être dans les bonnes dispositions pour lui exprimer ultérieurement nos requêtes. En effet, cette incise éveille la confiance en un Dieu proche et tout-puissant, en nous tournant vers lui et en regardant vers le Ciel. De fait, cette phrase introductive permet de prendre conscience de notre origine et de notre fin. Ne sommes-nous pas au cœur de la nouvelle évangélisation, reprendre conscience que Dieu est auteur de la vie et qu’il nous aime en nous appelant à la vie éternelle et au bonheur dès ici-bas ? « Entrez dans l’espérance » est bien le cri prophétique de Jean-Paul II au monde moderne pour retrouver le chemin de l’amour du Père par le Fils dans l’Esprit Saint.

Que ton Nom soit sanctifié. Animé par la vertu d’espérance, la première demande exprime notre réponse d’amour à Dieu, qui pousse à lui réclamer, par le don de crainte et en vivant la première béatitude des pauvres de cœur, que son Nom soit manifesté, tenu pour saint et proclamé en nous et par nous à tout le genre humain. Nous demandons donc au Père de vivre la première béatitude : « Heureux ceux qui ont une âme de pauvre, parce que le royaume des Cieux est à eux. » Cette perfection que nous propose Jésus-Christ pour nous procurer le bonheur dès ici-bas commence par l’esprit de pauvreté. Ceux qui ont une âme de pauvre sont détachés des richesses tant matérielles que spirituelles. Peu importe ce qu’ils ont ou ce qu’ils font, l’important est d’aimer Dieu en toutes choses, de vivre selon la vertu d’espérance jusqu’au détachement de soi-même. Avoir une âme de pauvre, c’est faire un bon usage des talents que Dieu nous a donnés à la naissance et qu’il continue de nous donner à chaque instant. Avoir une âme de pauvre, c’est être humble. L’humilité est l’inverse de l’orgueil, source de tout péché. L’humilité est donc le fondement nécessaire pour entrer dans la vie spirituelle. Le don de crainte permettra d’avoir un cœur contrit et humilié, d’avoir conscience de notre condition mortelle et de la nécessité de la croix. Pour avoir cette âme de pauvre, être humble, il est donc indispensable d’avoir conscience que Dieu nous aime. Il est donc indispensable de vivre de l’espérance comme je l’ai souligné plus haut. La vertu d’espérance permet d’entrer dans la vie spirituelle, car confiant dans l’amour de Dieu, je peux m’abandonner à lui. De fait, que ton Nom soit sanctifié par moi aujourd’hui. Que ton Nom soit le but de ma vie. Que ton Nom soit mon unique amour car j’espère tout de toi.

Que ton règne vienne. Ce ne sera que secondairement, dans la deuxième demande, que nous solliciterons la venue de son règne par le don de piété et en vivant la béatitude des doux, c’est-à-dire que nous participions à sa gloire dans son Royaume. Poussé intérieurement par l’amour de Dieu, nous voulons aimer (nous et le prochain) en Lui et pour Lui par l’obtention de la vie bienheureuse dans la Cité céleste. Nous demandons donc que son règne vienne et, par conséquent, que les justes progressent dans l’amour de Dieu, que les pécheurs se convertissent ou s’ils s’obstinent à haïr Dieu qu’ils soient châtiés, et que la mort soit détruite à la fin des temps. Autrement dit, nous demandons d’aller au Paradis, que tout soit soumis au Christ et que la loi du péché soit éradiquée. « Heureux les doux, parce qu’ils hériteront de la Terre. » L’humilité et l’esprit de pauvreté sont la condition indispensable pour être doux, car il n’est pas possible à une âme remplie d’elle-même qui ne recherche que son propre intérêt, d’aimer Dieu de façon désintéressée ainsi que de se mettre au service du prochain sans attendre d’autre récompense que celle de savoir que nous faisons la sainte Volonté du Christ. Ceux qui sont doux, sont ceux qui pratiquent la vertu cardinale de justice, et qui traitent le prochain avec douceur à l’imitation de la douceur que Jésus montre envers nous à chaque instant. Les doux souffrent avec patience les défauts des autres et les torts qu’ils en subissent sans chercher à se venger. Le don de piété filiale permet à l’âme de conformer sa volonté avec celle de Dieu, y compris dans les contrariétés. Ce don permet ainsi être doux. De fait, que ton règne s’instaure dans mon cœur pour que je témoigne de ton amour là où je vis.

En résumé, les deux premières demandes permettent d’exprimer le but de notre vie et de demander à Dieu qu’à chaque instant notre vie soit tournée vers Lui. Mais cela ne peut se faire que si son Nom est le centre de mes préoccupations et que par amour pour ce même Nom, je sois bien déterminé à étendre son règne en moi et autour de moi.

  1. Les demandes concernant les moyens

Il faut distinguer deux sortes de moyens, ceux qui ordonnent essentiellement à la fin et ceux qui ne le font que secondairement. Il faut donc séparer les troisième et quatrième demandes des trois suivantes. La première catégorie a un lien nécessaire à la Béatitude, en demandant l’obéissance à la volonté divine et les moyens pour y tendre. En revanche, la seconde catégorie ordonne indirectement à Dieu en lui demandant d’écarter les obstacles à la quête de la vie bienheureuse.

Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. La troisième demande concerne tous les actes méritoires faits par obéissance à Dieu. Nous lui demandons donc par le don de science et en vivant la béatitude des larmes, de nous donner la grâce de l’Esprit-Saint pour bien agir, pour observer ses commandements et pour faire sa volonté, c’est-à-dire bien user de notre liberté pour accomplir les desseins de la divine Providence sur nous, comme ont pû le faire les justes qui nous ont précédé et sont maintenant au ciel. Par cette demande, nous touchons directement au mystère de la coopération de l’homme à la grâce. Dieu veut nous sauver et réaliser notre justification, mais pas sans nous. Il veut que sa volonté soit faite à la fois par sa grâce et par nos efforts de constante conversion. Nous demandons donc à Dieu de vivre la troisième béatitude : « Heureux ceux qui sont dans le deuil, parce qu’ils seront consolés. » La douceur permet d’avoir une âme d’affligé, c’est-à-dire de souffrir avec patience et résignation les épreuves et le mal, ainsi que de s’attrister de voir autant de péchés dans le monde et aussi peu d’amour de Dieu. Pour cela, il faut que la vertu théologale d’espérance soit bien ancrée dans l’âme. Ceux qui ont une âme d’affligé offrent à Dieu ces souffrances en s’unissant à la Passion du Christ pour la conversion des pécheurs et le salut du monde. Encore faut-il ne pas réagir de façon trop humaine, mais avec tempérance. Le don de science va permettre de nous faire prendre conscience de notre condition de pécheur ainsi que la façon dont nous devons aimer Dieu et notre prochain. La science nous pousse à la pénitence et nous protège de tout désespoir.

Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour. La quatrième demande, concerne l’obtention des biens nécessaires à la vie présente pour notre salut. Nous demandons à Dieu les biens matériels indispensables à chacun afin d’en faire un bon usage par le don de force et en vivant la béatitude des affamés de justice. Nous réclamons aussi, à côté des biens terrestres, le pain de la Parole de Dieu et des sacrements, véritables nourritures de notre âme. Nous demandons donc à Dieu de vivre la quatrième béatitude : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, parce qu’ils seront rassasiés. » Ceux qui ont une âme affamée et assoiffée de justice sont ceux qui désirent devenir meilleurs avec la grâce de Dieu et qui espèrent en la conversion de tous les hommes afin que commence le Royaume de Dieu dès maintenant. Ces âmes pratiquent la vertu cardinale de force et le don de force vient soutenir l’effort fourni. Pour être affamé et assoiffé de justice, encore faut-il avoir conscience de l’horreur du péché et que le Christ a voulu nous faire comprendre la laideur du péché en mourant sur la Croix.

En résumé, ces deux demandes permettent directement de nous orienter vers notre fin en réalisant la volonté de Dieu avec des moyens proportionnés et bons. Les trois demandes suivantes sont plus orientées à enlever les obstacles à notre cheminement vers Dieu pour purifier notre cœur.

Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensé. La cinquième demande nous introduit dans la catégorie des demandes pour ôter les obstacles à notre marche vers la Béatitude. Par le don de conseil et en vivant la béatitude des miséricordieux, nous demandons une sincère contrition, le pardon de nos péchés et la grâce de pardonner à ceux qui ont péché contre nous. Cette demande permet à l’âme de se maintenir dans l’humilité par la reconnaissance de ses péchés et dans l’espérance de la miséricorde divine qui seule peut nous pardonner et nous restaurer dans l’intimité de Dieu. Cette supplique permet aussi d’imiter Dieu dans la perfection de la charité, c’est-à-dire dans le pardon des ennemis, condition indispensable pour recevoir la miséricorde divine. Refuser le pardon témoigne d’une dureté de cœur contraire à l’amour de Dieu et à la perfection à laquelle il nous appelle. Nous demandons à Dieu de vivre la cinquième béatitude : « Heureux les miséricordieux, parce qu’ils obtiendront miséricorde. » L’esprit de justice permet d’être miséricordieux, car il n’y a pas de vraie miséricorde qui ne repose pas sur la justice. Elle consiste à aimer son prochain en Dieu et pour Dieu, à pardonner sans cesse, à soulager les besoins et les misères du corps et de l’âme. Pour cela, il est nécessaire de pratiquer la vertu cardinale de prudence en étant assisté du don de conseil. Cet esprit de miséricorde vécu dans la foi purifie les cœurs de tout mal et de tout ce qui blesse l’Amour divin.

Ne nous soumets pas à la tentation. La sixième demande nous fait demander par le don d’intelligence et en vivant la béatitude des cœurs purs, la grâce de ne pas pécher et de surmonter toutes sortes de tentations. La tentation, issue soit de notre propre chair, du démon ou encore du monde, est une épreuve nécessaire pour éprouver notre vertu afin de la faire croître et de nous éloigner du mal. Cependant, la grâce de Dieu est indispensable pour la vaincre et progresser dans le bien. Nous demandons à Dieu de vivre la sixième béatitude : « Heureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu. » Les cœurs purs sont ceux qui détestent tous les péchés aussi petits soient-ils, et qui n’y ont plus aucune attache. Ils ont la volonté ferme de ne plus en commettre. Ils fuient toutes sortes d’impureté. Les cœurs purs ne tiennent pas compte du mal ; ils ne regardent que le bien et n’agissent que pour la plus grande gloire de Dieu. Cette pureté du cœur, que l’on appelle aussi l’enfance spirituelle, s’acquiert petit à petit par la pratique de la vertu théologale de foi accompagnée de la charité sans laquelle tout n’est que vanité. Le don d’intelligence permet la purification du cœur.

Délivre-nous du mal. La dernière demande concerne tous les maux qui peuvent nous arriver, à commencer par l’action du démon. Nous demandons donc à Dieu par le don de sagesse et en vivant la béatitude des artisans de paix, d’être délivrés du péché, de la maladie, des afflictions, du démon et des adversités du monde. Nous implorons aussi la grâce de ses consolations et de ses bienfaits pour supporter et vaincre toutes ces tribulations de telle manière qu’Il en retire un plus grand bien pour nos âmes et ainsi les transforme en bien. Nous demandons à Dieu de vivre la septième béatitude : « Heureux ceux qui font œuvre de paix, parce qu’ils seront appelés fils de Dieu. » La pureté de cœur permet d’être un artisan de paix, c’est-à-dire avoir une âme conservant la paix intérieure et ainsi être un fidèle instrument de la transmission de la paix divine aux âmes de bonne volonté. Les artisans de paix, assistés du don de sagesse, pratiquent la vertu théologale de charité.

Faut-il conclure ? En cette année de l’Eucharistie, j’ai seulement envie de dire de ne jamais cesser de méditer le Notre Père devant le Saint Sacrement pour que l’auteur même de cette prière dirige votre vie. De même qu’on ne fait pas n’importe comment le signe de croix, de même on ne récite pas mécaniquement l’Oraison dominicale. Prier le Notre Père ne signifie pas oublier l’Ave Maria, car Jésus nous a donné sa Mère pour nous conduire à lui. Sachons humblement lui demander de nous aider à prier le Notre Père. N’est-ce pas là un des objectifs du chapelet ?

Père Marc Antoine Fontelle