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Ste Thérèse de Lisieux, le Pape François et la Vierge Marie (Noéline Fournier)

Si quelqu’un connaît bien Thérèse et son Enseignement, c’est le Père Carme François-Marie LÉTHEL.

Ce spécialiste de la théologie des saints et Consulteur à la Congrégation pour les causes des Saints, a participé, entre autres travaux, à la préparation du Doctorat de Thérèse, déclaré trente-troisième Docteur de l’Eglise par Jean-Paul II en 1997 (et que le Père LÉTHEL appelle affectueusement pour cette raison « la grande trente-troisième »).

Cet accompagnateur spirituel et prédicateur de retraite recherché, a également prêché, en 2011, les exercices spirituels de carême au Pape Benoît XVI et aux cardinaux de la Curie. Il a consacré à la Sainte de Lisieux quatre des dix-sept méditations de cette retraite.

La « grande petite » Carmélite est placée au même niveau que Saint Thomas d’Aquin, et même encore plus haut, comme l’a affirmé le Pape émérite dans son allocution finale de cette retraite.

Selon le Père François-Marie, le rayonnement de Thérèse, déjà si grand, ne fait que commencer et il n’hésite pas à affirmer que « le troisième millénaire sera thérésien ou ne sera pas » !

Pour le Père François-Marie, derrière le récit à la première personne se cache un livre éminemment centré sur le Christ :

« Histoire d’une âme est l’œuvre d’une femme qui ne craint pas de parler continuellement d’elle-même, en racontant sa vie, son expérience la plus objective.

Mais, en réalité, ce n’est pas tant d’elle-même qu’elle parle, mais continuellement de Lui, Jésus, qui remplit toute sa vie. »

Le prêtre et religieux Carme voit « Histoire d’une âme », comme « un catéchisme ou un manuel de combat spirituel ». Pour lui, ce « chant d’amour » est un chef d’œuvre d’une richesse immense et qui touche tout le monde : « Il contient tous les grands thèmes de la vie chrétienne et fait entrer dans le cœur de tout le monde les grands contenus de la Foi Catholique : l’Amour de Jésus, de la Trinité, de la Sainte Vierge ».

 

« Il vaut mieux s’adresser au bon Dieu qu’à ses Saints », dit un proverbe.

De son côté, l’Eglise affirme que le Christ est l’unique intercesseur auprès du Père en faveur des hommes. Mais, en vertu du mystère de la Communion des saints, Dieu permet aux Saints du Ciel de participer à l’intercession du Christ et aux hommes de passer par eux pour toucher son Cœur de Père.

En effet, le Pape François voit et aime Marie comme Thérèse la voit et l’aime.

Pour le Pape, Marie est « normale » et donc « imitable ». Il l’a confié à un prêtre et journaliste : Don Marco Pozza, en insistant sur la « normalité » de la Mère de Dieu :

« La Vierge Marie est une jeune fille normale (…) éduquée normalement, ouverte au mariage, à fonder une famille (…). Toutes les femmes dans le monde peuvent dire : « Mais je peux imiter Marie parce qu’elle est normale ! » Même son mariage virginal, chaste, a été un mariage normal : travailler, faire les courses, faire les choses de la maison, éduquer son fils, aider son mari. »

 

Pour Thérèse, également, Marie est normale et imitable. La Religieuse s’en est elle-même expliquée à ses sœurs quelques semaines avant sa mort dans une longue confidence, dont voici un extrait :

 

« Pour qu’un sermon sur la Sainte Vierge me plaise et me fasse du bien, il faut que je voie sa vie réelle, pas sa vie supposée, et je suis sûre que sa vie réelle devait être toute simple. On nous la montre inabordable, il faut la montrer imitable (…) dire qu’elle vivait sa Foi comme nous, en donner des preuves par l’Evangile ».

 

Quelle convergence de vue entre la Carmélite Docteur de l’Eglise et le Pape Jésuite !

La convergence ne s’arrête pas là et elle culmine même dans la relation qu’ils ont l’un et l’autre avec la Mère de Dieu : une Relation Filiale.

Pour Thérèse, « la Sainte Vierge est la Reine du Ciel et de la terre, mais elle est plus Mère que Reine ». Elle, qui fit l’expérience de la tendresse maternelle de Marie à travers son « ravissant sourire ». Elle le raconte dans ses manuscrits :

« Ne trouvant aucun secours sur la terre, la pauvre petite Thérèse s’était aussi tournée vers sa Mère du Ciel, elle la priait de tout son cœur d’avoir enfin pitié d’elle (…) Tout à coup la Sainte Vierge me parut belle, si belle que jamais je n’avais rien vu de si beau, son visage respirait une bonté et une tendresse ineffable, mais ce qui me pénétra jusqu’au fond de l’âme ce fut le « ravissant sourire de la Sainte Vierge ».

 

 

Elle revivra cette expérience quatre ans plus tard à Paris, devant la statue de Notre-Dame-des-Victoires :

« Ah ! ce que j’ai senti à ses pieds, je ne pourrais le dire (…)

La Sainte Vierge m’a fait sentir que c’était vraiment elle qui m’avait souri et qui m’avait guérie.

J’ai compris qu’elle veillait sur moi, que j’étais son enfant, aussi je ne pouvais plus lui donner que le nom de « maman » car il me semblait encore plus tendre que celui de Mère ».

Comme en écho à sa chère petite Thérèse, le Pape François, chez qui la tendresse est un leitmotiv et même presque comme une seconde nature, n’a pas craint d’affirmer récemment :

« Marie est ma Maman. »

En novembre 2016, face aux Supérieurs majeurs des Ordres et Congrégations Religieuses, il avait précisé :

« La vraie Sainte Vierge n’est pas un chef de bureau de poste qui envoie chaque jour une lettre différente disant : « Mes enfants, faites ceci et puis le jour suivant, faites cela ». Non, la vraie Sainte Vierge, est celle qui fait naitre Jésus dans notre cœur, celle qui est Mère. Cette mode de la Vierge Superstar, comme protagoniste qui se met elle-même au centre, n’est pas catholique ».

Le Pape François a invité les croyants à adopter trois attitudes vis-à-vis de Marie :

« Se laisser regarder par elle, dont les yeux réfléchissent sur nous le paradis ; elle qui, quand elle nous regarde ne voit pas des pécheurs mais des fils et qui nous dit : « Chers enfants, courage ; je suis là, votre mère ». »

« Le regard maternel de Marie », a-t-il ajouté, « donne Confiance, aide à grandir dans la Foi, à nous aimer entre nous et nous rappelle que la tendresse, qui remédie à la tiédeur, est essentiel pour la Foi.

Se laisser embrasser par elle, qui embrassait tout, c’est-à-dire retenait tout, méditait tout et portait tout, et qui aujourd’hui, désire embrasser toutes nos situations pour les présenter à Dieu.

Marie dont l’étreinte est essentielle, a-t-il ajouté, est la Mère de la Consolation : qui console, c’est-à-dire qui est avec celui qui est seul.

Se laisser prendre par la main par elle, qui aide à passer les virages les plus difficiles de l’histoire, pour ne pas perdre la direction et rester sur le Chemin de la Vie, de la Liberté et de l’Unité.

Dieu ne s’est pas passé de sa mère, à plus forte raison en avons-nous besoin », a-t-il conclu.

Le Pape François a une grande Confiance en Marie, comme autrefois Thérèse :

« Jamais la sainte Vierge ne manque de me protéger aussitôt que je l’invoque. S’il me survient une inquiétude, un embarras, bien vite, je me tourne vers elle et toujours, comme la plus tendre des mères, elle se charge de mes intérêts », a-t-elle confié dans ses manuscrits.

« Chez Thérèse, le Christ est au cœur et au centre, comme en témoigne sa devise au Carmel :

« Aimer Jésus et le faire aimer ».

Dans ses écrits, elle parle de lui partout, quand elle ne s’adresse pas directement à lui. Pour elle, « Jésus est tout » et « Qui a Jésus, a tout ».

Comment se traduit le ‘Christocentrisme’ du Pape et de la Carmélite ?

Notamment par la place que l’un et l’autre, chacun selon sa vocation et sa place dans l’Eglise, donne à l’Evangile : ce livre qui rapporte, en quatre manuscrits différents et complémentaires, les Faits, Gestes et Paroles du Christ, durant sa vie terrestre. Ce choix n’est pas venue d’emblée mais s’est imposé peu à peu.

C’est d’abord l’Imitation de Jésus Christ qui a la préférence de Thérèse quand elle a 14 ans. Elle connaît par cœur tous les chapitres de sa « chère Imitation » et ce livre ne la quitte jamais. Puis elle découvre d’autres nourritures mais petit à petit l’Evangile élimine tous les concurrents, comme elle l’explique elle-même :

« Ah ! Que de lumières n’ai-je pas puisées dans les œuvres de Notre Père St Jean de la Croix ! À l’âge de 17 et 18 ans je n’avais pas d’autre nourriture spirituelle, mais plus tard tous les livres me laissèrent dans l’aridité et je suis encore dans cet état. Si j’ouvre un livre composé par un auteur spirituel (même le plus beau, le plus touchant), je sens aussitôt mon cœur se serrer et je lis sans pour ainsi dire comprendre, ou si je comprends, mon esprit s’arrête sans pouvoir méditer (…)

Dans cette impuissance, l’Ecriture Sainte et l’Imitation viennent à mon secours ; en elles je trouve une nourriture solide et toute pure.

Mais c’est par-dessus tout l’Evangile qui m’entretient pendant mes oraisons, en lui je trouve tout ce qui est nécessaire à ma pauvre petite âme. J’y découvre toujours de nouvelle Lumières, des sens cachés et mystérieux ».

L’Evangile est donc son livre de référence numéro un. Elle le porte constamment sur elle. Dans sa cellule, elle recopie de nombreux passages. Elle y fait sans cesse référence auprès de ses novices et dans ses récits.

« Puisque Jésus est remonté au Ciel, je ne puis le suivre qu’aux traces qu’Il a laissées, mais que ces traces sont lumineuses, qu’elles sont embaumées !

Je n’ai qu’à jeter les yeux dans le Saint Évangile, aussitôt je respire les parfums de la Vie de Jésus et je sais de quel côté courir…

Ce n’est pas à la première place, mais à la dernière que je m’élance ; au lieu de m’avancer avec le pharisien, je répète, remplie de Confiance, l’humble prière du publicain ; mais surtout j’imite la conduite de Madeleine, son étonnante ou plutôt son amoureuse audace qui charme le Cœur de Jésus, séduit le mien ».

 

Le Pape François aussi insiste à temps et à contretemps sur l’importance du livre du Maître. Ainsi, le mercredi 17 septembre 2014, lors d’une de ses catéchèses sur l’Eglise, il a donné ce conseils aux fidèles présents place saint-Pierre :

« Il est toujours bon d’avoir avec nous un petit Évangile, pour l’emporter dans sa poche, dans son sac, et d’en lire un passage au cours de la journée. Cela nous fait du bien ».

 

 

 

 

CHANT A MARIE

La première en chemin, Marie tu nous entraines

A risquer notre ‘oui’ aux imprévus de Dieu.

Et voici qu’est semé en l’argile incertaine

De notre humanité, Jésus-Christ, Fils de Dieu.

R : Marche avec nous Marie, sur nos chemins de Foi,

     Ils sont chemins vers Dieu, ils sont chemins vers Dieu.

 

« Thérèse de Lisieux ou La saga d’une Petite Sœur »

Bernard GOULEY, Rémi MAUGER, Emmanuelle CHEVALIER.

Ed. Fayard 1997.

 

Noéline FOURNIER

                  Carmel des Avirons – Ile de la Réunion