Travailler à la paix ! (Mgr Gilbert Aubry)

Nous avons tous besoin d’aimer et d’être aimés. Pas de haine envers qui que ce soit. Ni envers les personnes ni les groupes religieux ni les peuples. Un an après l’attentat contre Charlie Hebdo, ce journal reste fidèle à lui-même, à la dérision, à la provocation, à une idée laïciste de la laïcité. Le contexte international a évolué. La kalachnikov sur l’image censée représenter Dieu fait penser aux terroristes de Daech. Le triangle sur la tête du fuyard déphasé et fuyant renvoie à des religions ou à une transcendance qui n’a rien à voir avec les terroristes. Si la une de Charlie Hebdo descend Daech, le télescopage des symboles fait indirectement le jeu de Daech : la division, la suspicion et la peur nous sautent à la figure. Peut-être la haine. Lecture au premier degré. Deuxième degré : le faux dieu s’enfuit. Ne pas rester sur la réaction immédiate, dépasser la peur, ne pas avoir honte de sa religion, relever la tête, avancer paisiblement et courageusement dans la vie. Cela me conduit à reprendre l’essentiel de ma réflexion d’il y a un an « Nos raisons de vivre ».

On ne peut pas se représenter Dieu car toute représentation de Dieu ne représenterait que l’idée de l’auteur ou de l’artiste qui prétendrait représenter Dieu, ou encore l’idée d’une caricature de Dieu. En disant le mot Dieu ou en priant Dieu, les religions, d’une manière ou d’une autre, font référence à la source de la vie, au Créateur, à l’origine qui est en même temps la fin de toute chose, à la lumière de la lumière. Pour les chrétiens, autre chose est de se représenter le Christ qui est l’incarnation de Dieu donnant une valeur suprême à chaque être humain dans sa propre chair. Toute religion qui se respecte est une source de valeurs qui vient enrichir le vivre ensemble d’une communauté humaine, d’une communauté de destin.

Pour un être profondément croyant, s’attaquer à Dieu ou au nom de Dieu, c’est s’attaquer à l’humanité elle-même, à la source de la vie, à l’égalité entre les êtres humains qui sont tirés du même « humus », sur la même terre. Mais attention à nous ! Ce n’est pas nous qui pouvons défendre Dieu. C’est Dieu qui nous maintient dans l’existence, nous protège et qui nous dit au fond de notre conscience : tu ne tueras pas au nom de Dieu ! Hélas, dans l’histoire et aujourd’hui encore, nous pouvons trahir Dieu quand nous le mettons à toutes les sauces en nous servant de lui au lieu de le servir et de servir nos frères.

Nous pouvons débattre. Nous devons débattre. Mais comme dans tout débat, nous devons nous garder de contribuer à déchirer une religion, une société, à envenimer le contexte national et international, à susciter des conflits. Tous nous avons condamné la barbarie, l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo. Nous avons prié pour les morts, pour tous les morts de ce drame. Prions encore.

Tous nous sommes pour la liberté de la presse. Que la presse puisse se développer et qu’elle puisse librement s’exprimer sur tous les sujets. Cependant, la liberté de la presse ne permet pas de tout dire et de tout montrer au nom de cette liberté si elle piétine la liberté des autres dont la liberté de croire. Le 15 janvier 2015, le pape François a déclaré « On ne peut provoquer ou insulter la foi des autres. On ne peut la tourner en dérision ». Tout groupe a droit à une existence paisible quand il ne menace pas le bien commun.

Tous nous devons défendre la liberté de tous. Elle se conjugue avec l’égalité. Elle se signe avec la fraternité. Tout ce qui vient détruire ce trépied « liberté, égalité, fraternité », en France et ailleurs, fragilise le vivre ensemble humain et risque de hâter sa destruction. C’est le contraire qu’il faut rechercher et bâtir. Travailler à la paix. Mieux vivre ensemble pour construire notre vivre ensemble. Etre avec. Nos raisons de vivre doivent nous aider à raison garder. Développons l’estime les uns vis-à-vis des autres, les uns avec les autres. Et nous gagnerons la paix. Ensemble.

Le 5 janvier 2016, Monseigneur Gilbert AUBRY

 

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