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20ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER (Jn 6,51-58)

« Jésus Pain de Vie par sa chair offerte »

(Jn 6,51-58).

 

En ce temps-là, Jésus disait à la foule : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »

     

            Au tout début de son discours, Jésus avait parlé du « pain de Dieu » comme celui qui « descend du ciel et donne la vie au monde ». Puis il s’était lui-même présenté comme étant ce « pain de vie » par sa Parole. Il s’agissait donc avant tout d’accueillir cette Parole en « venant à » lui, en « croyant en lui » (Jn 6,35-47). Et puisque « celui que Dieu a envoyé prononce les Paroles de Dieu car il donne l’Esprit sans mesure » (Jn 3,34), en recevant cette Parole de tout cœur, c’est aussi « l’Esprit qui vivifie » que l’on reçoit, et donc, avec lui, le Don de la vie éternelle. « Tu as les paroles de la vie éternelle » lui dira plus tard St Pierre (Jn 6,68).

            Ici, nous assistons à un nouveau départ. Jésus redit qu’il est « le pain vivant descendu du ciel pour qu’on le mange et ne meure pas. » Et pour la première fois, un mot nouveau apparaît, celui de « chair » : « Et même, le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » Autrement dit, « le Verbe fait chair » va se donner tout entier, corps, âme et esprit, pour nous délivrer de la mort, « le salaire du péché, c’est la mort », et nous permettre de vivre de sa vie, « le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus » (Rm 6,23). Accueillir ce « pain-chair » par sa foi, c’est alors accueillir tous les fruits de son offrande sur la Croix pour le salut des pécheurs : l’Eau Vive de l’Esprit qui jaillit en surabondance de son Cœur ouvert (Jn 19,34 ; 7,37-39 ; 4,10-14). Dès lors, le verbe sans cesse répété est « manger », littéralement « croquer, mastiquer », un verbe volontairement très concret pour ce « pain-chair », mais qui renvoie toujours en fin de compte à l’acte de foi exprimé cette fois-ci avec tout son corps. Quand Jésus dit : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle », croire en lui, c’est se lever, aller recevoir ce « pain » et le « manger », une démarche qui dit à tous, sans un mot : « Je crois ! » Et c’est bien ce que nous disons en réponse à celui ou celle qui nous présente « le Corps du Christ » : « Amen », un mot qui, dans la langue de Jésus, signifie « C’est vrai ! »

            Et le fruit de cet accueil de Jésus « pain de vie par sa parole » et « pain de vie par sa chair offerte » sera un Mystère de Communion avec Lui, toujours en face à face dans la foi, mais, de cœur, dans l’unité d’un même Esprit, d’une même Lumière, d’une même vie : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi en lui. »         DJF




Rencontre autour de l’Évangile – 20ième Dimanche du Temps Ordinaire

« Et moi,

je le ressusciterai au dernier jour…. »

TA PAROLE SOUS NOS YEUX

Situons le texte et lisons (Jn 6, 51-58)

Nous continuons à méditer le discours sur le pain de vie : après avoir affirmé qu’il est descendu du ciel, Jésus annonce que sa chair est la vraie nourriture et son sang la vraie boisson. Les gens qui l’entendent sont de plus en plus choqués.

Remarque importante

La méthode proposée pour le partage est un peu différente : il s’agit d’une contemplation de Jésus. C’est pourquoi nous sommes invités à fixer notre attention d’abord sur lui (ce qu’il fait, ce qu’il dit…) afin d’entrer dans ses pensées, son intention, selon le projet de l’évangéliste qui a écrit pour évangéliser catéchiser les lecteurs.

 

Regardons – réfléchissons – méditons

Regardons Jésus et  écoutons-le

Cet homme-là : Mettons-nous à la place des juifs qui voient Jésus. 

Sa chair à manger : Pouvaient-ils comprendre autre chose que le geste matériel de manger la chair ?

Amen, amen : Malgré le réalisme cru des mots, qui choque ses auditeurs,  Jésus engage toute son autorité dans ce qu’il dit. Et même, le mot hébreu que l’on traduit par «manger» veut dire «croquer».

C’est dire l’importance de la révélation faite par Jésus : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle,

et moi je le ressusciterai …ma chair, vraie nourriture ; mon sang, vraie boisson». Ces paroles doivent, sinon nous choquer, du moins nous étonner  et même  nous déranger ! Peut-être sommes-nous trop habitués à les entendre…

comme si c’était quelque chose de normal, voire de banal !

Demeurer en Jésus :  Jésus en parlera longuement dans l’image de « la vigne » (Jn15).

« Moi je vis par le Père, celui qui me mange vivra par moi ». Avec saint Paul, le chrétien qui se nourrit de Jésus, peut dire : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi. »

A plusieurs reprises durant la célébration de la messe, nous sommes provoqués à un acte de foi : Cherchons-les ensemble.

Pour l’animateur 

Les auditeurs de Jésus ne pouvaient pas comprendre Jésus », il leur demandait simplement de lui faire confiance ; tout comme la Samaritaine qui ne comprenait pas lorsque Jésus lui parlait de l’eau qui serait une source jaillissante pour la vie éternelle.

Et nous ? Quelle est notre foi ?

A chaque eucharistie, après la consécration, le célébrant annonce « Il est grand le mystère de la foi » Et que répondons-nous ?

Avant la communion, notre foi est encore interpellée : « Voici l’agneau de Dieu ».  Au moment de la communion, chacun est encore invité à un acte de foi personnel, quand celui qui présente l’hostie dit : « Le Corps du Christ. » 

L’Eucharistie, corps et sang, communique aux croyants les deux dons que chacun désire, plus ou moins consciemment : l’assurance de vivre éternellement et d’être en permanence uni à Dieu.

TA PAROLE DANS NOS CŒURS

Seigneur Jésus, donne-nous de te faire totalement confiance. Certes, nous avons compris que ton Corps et ton Sang, c’est sous la forme du pain et du vin  consacrés, qu’ils sont pour nous nourriture et boisson. Mais c’est toujours un grand acte de foi en Toi et en ta Parole que tu nous demandes, pour croire sans hésiter que le Pain c’est toi, en ton corps ressuscité, et que le vin , c’est Toi en  ton sang versé et glorifié. Fais grandir en nous la foi.

 

TA PAROLE DANS NOTRE VIE

« Celui qui  mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi je demeure en lui. »

Est-ce bien comme cela que nous comprenons notre démarche de communion ?

Quel poids donnons-nous à notre ‘Amen’ quand on nous présente l’hostie  à la communion ?

Quelle dignité donnons-nous à notre démarche quand nous allons communier : la façon de nous habiller, de nous déplacer, de tendre les mains, de manger le pain consacré (c’est en tout cela que nous exprimons notre foi en la présence de Christ) … ?

« Celui qui mange ma chair et boit mon sang, a la vie éternelle, et moi je le ressusciterai au dernier jour. »

Est-ce que ma foi en la résurrection des morts, en ma propre résurrection est bien ancrée en moi du fait que je communie au Corps du Christ ?

 

ENSEMBLE PRIONS   

Faire méditer (méditation en écho) dans le groupe le chapitre 15 : La Vigne. Insister sur le mot «demeurer», en soulignant que les paroles du Christ se réalisent au plus haut point quand nous mangeons le Pain qui est son Corps ressuscité. En lui, grâce à l’Esprit (sève de vie divine) nous sommes tous unis en une seule Vigne, l’Église. L’Eucharistie «fait» l’Église. L’Église est «communion» des fidèles dans le Christ.

Pain donné pour notre vie,
Corps et sang de Jésus Christ,
Pain de Dieu pour les pécheurs
Fais grandir l’amour dans nos cœurs.
Dans le désert tu as nourri l’affamé,
Voici la manne de ton peuple en chemin,
Le pain du ciel reçu des mains du Père.
Nous le croyons, tu es le pain de vie
Louange à toi, qui nous relèves !

 

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Le désir de la contemplation (Thomas Merton)

Quoique nous puissions penser du champ couvert par la vocation contemplative (si elle est ou non, à notre avis, « ouverte à tous »), le fait est que c’est quelque chose d’ordinaire », du moins en droit, dans toutes les religions évoluées. Partout en effet, que ce soit dans le christianisme ou le bouddhisme, l’hindouisme et l’islam, on trouve des exemples de vie contemplative, au moins au sens large. Partout, on trouve au moins une forte aspiration naturelle à l’unité intérieure et à la communion[1] intuitive avec l’Absolu. Et partout, on trouve l’une ou l’autre expression de quelque forme d’expérience spirituelle, souvent naturelle, parfois surnaturelle. Cette dernière est possible théoriquement au moins n’importe où sous le soleil pour n’importe quel homme droit en quête sincère de la vérité, et qui répond aux inspiration de la grâce divine.

C’est ici évidemment un sujet délicat et subtil, e je n’ai pas voulu entrer dans les questions âprement débattues qui surgissent de tous côtés à son propos. Mais il me semble nécessaire d’avoir quelque compréhension des faits, et que pour cela, le mieux est de les voir sous leur angle le plus simple et moins sensationnel. Car il ne faut pas exagérer, déformer, et magnifier, la contemplation. Elle est essentiellement simple et humble. Nul ne peut y entrer que par le chemin de l’obscurité et de l’oubli de soi. Elle implique également toute une discipline, mais par-dessus tout celle, normale, de la vertu quotidienne ; notamment la justice envers autrui, l’honnêteté intellectuelle, beaucoup de travail, l’absence d’égoïsme, la fidélité aux devoirs de son état de vie, l’obéissance, la charité, l’esprit de sacrifice. Nul ne devrait se laisser leurrer par ses aspirations contemplatives s’il n’est pas prêts à assumer, en premier lieu, les travaux et obligations ordinaires de la vie morale. La contemplation n’est pas une espèce de raccourci magique et facile pour arriver au bonheur et à la perfection. Et pourtant, puisqu’elle vous met effectivement en contact avec Dieu dans une relation je-Tu d’amitié mystérieusement expérimentée, elle apporte nécessairement cette paix que le Christ a promise et que « le monde ne peut pas donner ». Il peut y avoir beaucoup de désolation et de souffrance dans l’esprit du contemplatif, mais il y a toujours plus de joie que de chagrin, plus d’assurance que de doute, plus de paix que de désolation. Le contemplatif est un homme qui a trouvé ce que tout homme, d’une façon ou d’une autre, recherche.

S’il en est bien ainsi, il est à coup sûr légitime que tout un chacun désir et recherche cet accomplissement de soi, cette expérience de la réalité, cette voie d’entrée dans la vérité. Mais ici encore, on se heurte à un paradoxe : si ce désir est, en soi, légitime, est-il néanmoins licite pour ceux qui se méprennent totalement à son sujet ? Doit-on encourager quelqu’un à désirer la contemplation s’il est pour le moment incapable d’en saisir la vraie nature et plus encore, de remplir les conditions requises ?

Laissons tout un chacun la désirer, dirai-je, pourvu seulement qu’il soit sincère et réfléchi et qu’il reste ouvert à la vérité. Rigidité et préjugés sont les grands obstacles à la contemplation. Celui qui croit savoir à l’avance ce qu’elle est s’empêche d’en découvrir la vraie nature puisqu’il est hors d’état de changer d’avis[2] et d’admettre quelque chose de totalement nouveau. Celui qui croit que la contemplation est chose sublime et spectaculaire n’est pas réceptif à l’intuition d’une Réalité suprême et transcendante, et en même temps immanente à son moi ordinaire. Celui qui a besoin d’être exalté, et pour qui le mysticisme est le summum de l’ambition humaine, ne pourra jamais connaître la libération accordée à ceux-là seuls qui ont renoncé à réussir. Et puisque nous sommes pour la plupart rigides, attachés à nos idées, convaincus de notre sagesse, fiers de nos capacités, et livrés à l’ambition personnelle, le désir de la contemplation est dangereux pour n’importe lequel d’entre nous. Mais si nous voulons vraiment nous libérer de ces péchés, il y a des chances pour que le désir de la liberté contemplative et de l’expérience de la réalité transcendante s’éveille en nous de lui-même, à notre insu ; et que ce désir soit satisfait presque avant que nous en prenions conscience. C’est ainsi que se réalise une vraie vocation contemplative.

Extrait de « L’expérience intérieure », par Thomas Merton (Editions du Cerf)

[1] « communion » remplace « contact ».

[2] En anglais : change his mind, expression toute faite équivalente en général à un simple changement d’avis ou d’opinion. Faute de mieux, j’ai utilisé la traduction habituelle même si elle laisse ici à désirer dans la mesure où il s’agirait en fait d’une véritable conversion de l’esprit (N. d. T.).




Audience Générale du Mercredi 8 Août 2018

PAPE FRANÇOIS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre
Mercredi 8 Août 2018


Frères et sœurs, nous approfondissons aujourd’hui le thème de l’idolâtrie avec l’idole par excellence, le veau d’or. Dans le désert, lieu où règnent la précarité et l’insécurité, alors que Moïse tarde à redescendre de la montagne, le peuple demande un dieu visible pour pouvoir s’identifier et s’orienter. Car la nature humaine, pour fuir la précarité, cherche une religion « à faire soi-même ». Nous comprenons ainsi que l’idole est un prétexte pour se placer au centre de la réalité, en adorant les œuvres de ses propres mains. De fait, le peuple obtient d’Aaron un veau d’or, symbole de la richesse et de tous les désirs qui donnent l’illusion de la liberté mais qui asservissent l’homme en réalité. Tout vient de l’incapacité à faire confiance à Dieu, à placer en lui notre assurance, à lui laisser donner une vraie profondeur aux désirs de notre cœur. Or, quand on accueille le Dieu de Jésus-Christ, on découvre que la reconnaissance de notre faiblesse n’est pas un malheur mais la porte par laquelle entre le salut de Dieu qui nous permet de refuser les idoles de notre cœur. Ainsi, en Jésus-Christ, visage du vrai Dieu, notre fragilité n’est plus une malédiction mais le lieu de la rencontre avec le Père et la source d’une nouvelle force venue d’en haut.

Je suis heureux de saluer les pèlerins venus de France, de Côte d’Ivoire et de divers pays francophones. Je souhaite que cette période estivale nous aide à tourner notre regard vers le Christ crucifié qui a pris jusqu’au bout notre précarité pour la combler d’amour et de force. Que le Seigneur nous aide ainsi à refuser les idoles de notre cœur. Que Dieu vous bénisse !




19ième Dimanche du Temps Ordinaire – Claude WON FAH HIN

 

19e dimanche ordinaire – Année B – Jean 6 41–51

 

Après avoir montré la puissance de Yahvé face au dieu Baal au Mont Carmel, le prophète Élie est découragé parce que l’épouse du roi Achab, Jézabel, qui a introduit le culte des idoles en Israël, veut sa mise à mort. C’est pourquoi Élie s’enfuit dans le désert. Il souhaita mourir et dit :  C’en est assez maintenant, Yahvé! Prends ma vie… ». C’est ce qui passe aussi aujourd’hui, lorsque des personnes gravement malades, isolées et abandonnées par leur famille, ou d’autres personnes qui viennent de connaître une séparation, ou d’autres cas de personnes endettées, alcooliques, droguées etc.. se découragent. Pourtant, pendant que le prophète Élie s’endort, Dieu n’arrête de prendre soin de lui en envoyant un ange le nourrir en deux fois : « Lève-toi et mange ». Les expressions « se coucher et s’endormir » s’opposent à « lève-toi et mange » et font penser à la « mort et résurrection du Christ ». Dieu n’abandonne jamais les siens. Un chrétien n’a pas à se décourager, parce que Dieu prendra toujours soin de lui, à sa manière, pour nous ramener à Lui. Uni à Dieu, un chrétien, quelle que soit sa vie, même malade, même très âgée, même abandonnée des siens, est toujours en mission, à l’exemple de Marthe Robin qui, paralysée pendant plus de cinquante ans sur son lit, ne recevant qu’une hostie par jour, a sauvé, par la conversion, de nombreuses personnes qui venaient la visiter. Dans le découragement, cela ne sert à rien de se révolter contre Dieu. Au contraire, refugiez-vous en Lui avec l’aide de Marie.  Saint-Paul nous dit « Ne contristez pas l’Esprit Saint de Dieu, qui vous a marqués de son sceau pour le jour de la rédemption. 31 Aigreur, emportement, colère, clameurs, outrages, tout cela doit être extirpé de chez vous, avec la malice sous toutes ses formes. 32 Montrez-vous au contraire bons et compatissants les uns pour les autres, vous pardonnant mutuellement ». L’expression « les Juifs se mirent à murmurer » signifie que la foule manque de foi envers Jésus, tout simplement parce qu’elle connaît Jésus : « c’est le fils de Joseph dont nous connaissons le père et la mère ». Jusqu’à présent, Jésus apparaissait comme quelqu’un qui n’a rien d’exceptionnel. C’est quelqu’un du village comme n’importe qui. Les gens l’ont jugé sur son apparence extérieure, sans savoir qu’il était fils de Dieu. Il y a ainsi des gens anonymes qui sont des saints en devenir et que nous ignorons parce qu’ils ne font rien d’exceptionnel mais qui, également, ne contristent pas l’Esprit Saint de Dieu, extirpant de chez eux tout ce qui déplaît à Dieu : aigreur, emportement, colère, clameurs, et la malice sous toutes ses formes. Ce sont souvent des gens authentiquement  simples ou non pas ceux qui se croient simples, capables de se montrer bons et compatissants, capables de pardonner, acceptant même l’humiliation en silence comme le Christ dans sa Passion. Ils ont pour ainsi dire « aplani le chemin de Dieu » en leur propre cœur pour mieux se mettre au service des autres, aussi sont-ils centrés sur le Christ et uniquement sur Lui pour mieux se tourner vers les autres. Le Pape François (Gaudete et Exsultate – §112) nous dit : « la première des grandes caractéristiques de la sainteté, c’est d’être centré, solidement axé sur Dieu qui aime et qui soutient. Grâce à cette force intérieure, il est possible d’endurer, de supporter les contrariétés, les vicissitudes de la vie, et aussi les agressions de la part des autres, leurs infidélités et leurs défauts », montrant ainsi que la force de Dieu qui nous anime réside justement dans cette capacité à combattre nos propres défauts, car nos défauts sont nos véritables ennemis, causés par l’esprit du Mal.

Le peuple de Dieu libéré de l’esclavage d’Egypte avait aussi murmuré contre Moïse et Aaron. Mais cette fois-ci, il murmurait parce qu’il avait faim et soif et aurait préféré retourner en Egypte en tant qu’esclave pour pouvoir manger à leur faim. Et Dieu leur donne la manne en plein désert pour les soutenir dans leur traversée du désert. Dieu vient toujours au secours de son peuple affaibli.

Jn 6,32-33 : « 32 ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain qui vient du ciel; mais c’est mon Père qui vous donne le pain qui vient du ciel, le vrai; 33 car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et donne la vie au monde ». Le Pain de vie est un homme envoyé par le Père : Jésus. Il se présente à nous de deux manières : le Verbe de Dieu ou Parole de Dieu- et le Pain sous forme d’hostie. Et nous avons besoin des deux. Mt 4,4 : « Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Sg 16,26 : « ce ne sont pas les diverses espèces de fruits qui nourrissent l’homme, mais c’est ta parole qui conserve ceux qui croient en toi ». La Parole est si importante qu’une personne qui ne peut pas communier à l’hostie peut le faire à la Parole de Dieu. Et cette communion à la Parole est parfois bien plus importante que celle à l’hostie : lorsque l’on communie à la Parole, il y a souvent un échange entre la Parole de Dieu et celui qui l’écoute attentivement, et cela devient une oraison, une prière face à face avec Dieu. Marthe Robin nous dit (« Marthe Robin – J.Jacques Antier – P.326-327 ) : «  Si on me demandait que vaut-il mieux faire, l’oraison (prière en tête à tête avec Dieu) ou la communion, je répondrai l’oraison. « Priez, priez sans cesse ! » Or, il est difficile de bien prier et de prier sans cesse si le cœur ne se remplit pas de bonnes pensées, fruits de la méditation. La communion ne suppose pas toujours la vertu. On peut communier et se rendre coupable. L’oraison de chaque jour ne veut pas dire qu’on soit vertueux ; elle est une preuve qu’on tend à le devenir. On trouve des chrétiens qui communient tous les jours et qui sont en état de péché mortel. Mais on ne trouve jamais une âme qui fasse oraison tous les jours et qui demeure dans le péché ». Il est en effet impossible à quiconque de faire une fausse prière à Dieu : ou bien il prie du fond du cœur, ou bien il ne prie pas, mais il ne peut pas faire semblant. Alors que pour la communion à l’hostie, Marthe Robin le dit : « il y a des chrétiens qui communient tous les jours alors qu’ils sont en état de péché mortel ». Il est nécessaire de communier au Christ des deux manières : Parole et Pain. Prenez un soin particulier pour la communion au Pain, à l’hostie. Ce n’est pas parce que vous mangez l’hostie que vous êtes forcément en communion avec le Christ, cela peut être aussi un moment de scandale devant Dieu même si vous voulez sauver les apparences devant les hommes. Centrons-nous sur le Christ, avec un véritable esprit de pureté ou un grand désir de pureté, au moment de communier à l’hostie. Voici ce que Jésus dit à deux grandes saintes : Marguerite Marie Alacoque et Sainte Gertrude.

Un jour que sainte Marguerite-Marie se préparait à la sainte communion, elle entendit une voix qui disait : « Regarde, ma vie, le mauvais traitement que je reçois dans cette âme qui vient de me recevoir. Elle a renouvelé toutes les douleurs de ma passion… Je veux que, lorsque je te ferai connaître le mauvais traitement que je reçois de cette âme, tu te prosternes à mes pieds après m’avoir reçu, pour faire amende honorable à mon Cœur, offrant à mon Père le sacrifice sanglant de la croix, à cet effet, et tout ton être pour rendre hommage au mien et réparer les indignités que je reçois dans ce cœur. » La sainte fut surprise d’entendre ces paroles sur une âme qui venait de se laver dans le sang précieux ; Notre-Seigneur lui dit : « Ce n’est pas qu’elle soit dans le péché, mais la volonté de pécher n’est pas sortie de son cœur, ce que j’ai le plus en horreur que l’acte du péché, car c’est appliquer mon sang par mépris sur un cœur corrompu, d’autant que la volonté du mal est la racine de toute corruption ».  A ces mots, la sainte souffrit de grandes peines, demandant miséricorde pour cette âme ; Notre-Seigneur lui dit : « J’ai oui ton gémissement, et j’ai incliné ma miséricorde sur cette âme. » (Éd. Gauthey, 1, p. 112.)

Jésus avait montré à Sainte Gertrude comment la gloire d’une âme s’accroît par la fréquente réception de l’Eucharistie. Oh ! mon Bien-Aimé, soupirait-elle, combien les prêtres nous dépasseront dans la gloire, car ils ont la joie de communier tous les jours » lui dit alors Gertrude. Jésus consola cette plainte amoureuse en expliquant à Sainte Gertrude que le désir de Le recevoir compense largement les nombreuses communions d’habitude, tièdes et peu ferventes : « une ferveur plus grande peut compenser la participation moins fréquente au divin banquet. Pourvu qu’on approche, convenablement disposé à la table sainte (c’est-à-dire « bien disposé à recevoir le Christ parce qu’on le désire ardemment), on aura un accroissement de la grâce propre à ce sacrement, dont les effets et les fruits diffèrent selon la pureté de la préparation…Nulle de ces joies ne sera le partage de ceux qui célèbrent le Saint Sacrifice avec froideur et routine ».

Il faut donc un grand désir de recevoir Dieu au moment de la communion, et donc de se préparer sérieusement à la messe afin d’avoir ce « désir du Christ », et ne pas s’approcher du Seigneur sans une ferveur profonde et vraie en sa vie intérieure. Approchons-nous du Seigneur en toute humilité, sans aucune honte, avec le cœur d’un enfant, heureux d’avancer vers le Père (toute la messe s’adresse au Père) par un grand désir du Christ. Il en sera de même pour les personnes qui ne peuvent pas communier au Corps du Christ mais veulent une bénédiction du Père : qu’ils désirent au plus profond d’elles-mêmes s’unir ardemment au Christ.  Mais il nous sera difficile de venir à la communion à La Parole de Dieu ou au Corps du Christ le samedi ou le dimanche si on ne s’est pas préparé pendant toute la semaine : avec Marie, prions Dieu, chaque jour de la semaine, de nous donner ce désir ardent d’être en communion avec le Christ tous les jours de la vie et particulièrement à chaque messe au moment de la communion à la Table de la Parole et à la Table de l’Eucharistie.




19ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Jn 6, 41-51)

Évangile selon saint Jean 6, 41-51

 

« Moi, je suis le pain vivant,

qui est descendu du ciel. »

 

La semaine dernière, la première lecture nous parlait de la manne donnée par Dieu pour que son peuple puisse continuer à vivre dans le désert. Cette semaine, c’est le prophète Elie qui n’en peut plus, moralement et physiquement, et qui s’allonge en demandant à Dieu de lui reprendre la vie, et s’endors. Par deux fois il est réveillé par un ange qui lui ordonne de manger du pain et boire de l’eau pour qu’il puisse aller à la rencontre du Seigneur. C’est le pain qui redonne courage et force pour continuer la mission, pour ne pas se laisser aller à la mort.

Le pain que propose Jésus, dans l’évangile, n’est pas pour nous permettre de ne pas mourir physiquement, mais il nous permet de passer la mort physique pour aller vers la vie éternelle. Et c’est une certitude, Jésus l’affirme : « Il a la vie éternelle, celui qui croit. ». Le verbe est au présent, et pas au futur ; dès maintenant, au cours de notre vie terrestre, nous avons déjà la vie éternelle ; à une condition toutefois : que nous croyons !

Dans ce court extrait de l’évangile, par trois fois Jésus parle du « pain descendu du ciel », mais avec chaque fois une petite différence.

La première fois, il dit : « Moi, je suis le pain qui est descendu du ciel. ». En fait, il n’avait pas dit exactement cela, mais c’est ce qu’on retenu les gens qui l’écoutaient : ils n’avaient seulement retenu qu’il parlait de pain, et qu’il venait du ciel. Pour eux, il est le seul concerné. Mais pas eux. Ils ne comprennent pas ce qu’il veut dire.

La deuxième fois, « Moi, je suis le pain de la vie », celui qui donne la vie. Et ici, c’est tout le monde qui est concerné, et pas seulement lui. Et une vie qui dure même après la mort …

La troisième fois, « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel ». Cette fois-ci, cela ne concerne que Jésus. Mais si Jésus insiste sur le fait qu’il est vivant, c’est pour signifier qu’il va mourir et que le pain qu’il va donner, c’est sa « chair, donnée pour la vie du monde. ».

Cette dernière phrase donnera lieu à une nouvelle incompréhension entre les juifs et Jésus, que nous verront la semaine prochaine.

Mais revenons sur l’incompréhension du début de cet évangile. Comment Jésus peut-il affirmer qu’il est descendu du ciel alors que, eux, les juifs, ils connaissent d’où il vient : de Nazareth ! Ils connaissent ses parents : Joseph et Marie ! Certains l’ont connu lors de sa vie cachée. Enfants, ils ont joué avec lui. Ils sont allés à la synagogue ensemble, ils lui ont commandé du travail. Comment peut-il dire des choses pareilles ?

Jésus lui-même l’a dit : « Un prophète n’est méprisé que dans son pays, sa parenté et sa maison. » (Mc 6,4). Et même encore maintenant, on comprend fort bien la réaction des juifs. Surtout dans un cas comme celui-ci qui mélange des éléments qui viennent du ciel, la demeure des ‘dieux’, et des gens de la terre. Les faits paraissent toujours suspects, on se méfie, on se demande si les gens ont bien toute leur tête …

On a bien du mal à croire ceux qui disent avoir vu une soucoupe volante, ou qui disent avoir vu ou avoir été enlevés par des extra-terrestres…

On a du mal à y croire, surtout si on est catholique. Et surtout si ça touche la religion.

Quelle a été la réaction des gens de Lourdes quand Bernadette dit qu’elle a vu une belle dame à Massabielle ? Les parents lui interdisent de retourner à la grotte, on la traite de folle, la population est partagée entre ceux qui croient que Bernadette a vu une personne, la Vierge, et ceux qui pensent qu’elle affabule. Et il faudra attendre que la belle dame dise son nom pour que les prêtres de la paroisse la prennent en considération. Même chose au début pour les voyants de Fatima… Sans parler des ‘apparitions’ de Medjugorje qui durent depuis 27 ans et pour lesquelles aucune décision officielle n’a encore été formulée de la part de l’Église sur leur véracité : il y a ceux qui y croient, et ceux qui n’y croient pas …

« Prenez un bel arbre, son fruit sera beau ; prenez un arbre qui pourrit, son fruit sera pourri, car c’est à son fruit qu’on reconnaît l’arbre. » (Mt 12,33).

Mais il faut parfois  beaucoup de temps pour que l’arbre porte un fruit, … et qu’on puisse apprécier ce fruit en termes spirituels. Parlant des faux prophètes, Jésus dit : « C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. » (Mt 7,16). Et l’on se souvient de l’engouement qui a suivi les ‘révélations’ du ‘Petit lys d’amour’, malgré les mises en garde de l’évêque, et ce qu’il en est advenu par la suite…

Que les juifs ne comprennent pas Jésus, c’est tout à fait compréhensible. Jésus lui-même le dit : « Celui qui est de la terre est terrestre, et il parle de façon terrestre. Celui qui vient du ciel est au-dessus de tous, il témoigne de ce qu’il a vu et entendu, et personne ne reçoit son témoignage. » (Jn 3,31-32).

Pour nous, il s’agit de recevoir le témoignage de Jésus, de croire en lui, de croire qu’il nous donne la vie éternelle par ce pain qu’il nous invite à manger, « sa chair donnée pour la vie du monde. ».

Et comme pour Elie, il faudra le reprendre, une fois, deux fois, … une multitude de fois, « car il est long le chemin qui te reste » pour rencontrer Dieu.

Seigneur Jésus,

je tends les mains vers toi,

pour t’offrir le peu que j’ai,

mais surtout pour recevoir de toi

ce qui est la source de ma vie :

ton corps sous la forme de l’hostie consacrée, 

pain de vie vivifiant pour cette terre,

chemin d’accès pour te rencontrer.

 

Francis Cousin

 

Pour accéder à cette prière et à son illustration cliquer sur le titre suivant : Prière dim ord B 19° A6

 




19ième Dimanche du Temps Ordinaire – Homélie du Père Louis DATTIN

 

« Lève-toi, mange, marche… »

Jn 6, 41-51

 

Un homme à bout, titubant de fatigue, dans le désert, son corps n’en peut plus, il est au bout du rouleau. Son âme aussi n’en peut plus, il est complètement découragé :

il n’a plus le moral. Trop, c’est trop ! Et pourtant cet homme-là, c’est Elie, le grand Elie, celui qui a maintenu la foi d’Israël dans un monde complètement paganisé : le vainqueur devant les cent prêtres de Baal qui criaient pour que Dieu incendie leur autel alors que, seul, celui d’Elie, reçut le feu du ciel.

Hélas ! Ce n’est plus le grand Elie, c’est le pauvre Elie, l’ombre de lui-même, épuisé, la bouche sèche, l’estomac creux, avec des muscles qui lui font mal et qui ne répondent plus… il s’écroule de fatigue à l’ombre d’un buisson : « Seigneur, c’en est trop ! Reprends ma vie. Je ne vaux pas mieux que mes pères ».

Il tira un pan de manteau sur sa tête et s’endormit.

Cet Elie, comme il nous ressemble à certains moments de notre vie ! Rappelez-vous, vous aussi, ces étapes difficiles, quand vous étiez à plat,  » à zéro » comme on dit, dans la déprime, le marasme, que tous les horizons étaient bouchés et que vous aviez si peu de courage, que vous n’aviez même plus envie de continuer, « C’en est trop ! Reprends ma vie », envie de fuir la vie pour un temps ou la mort pour toujours, le sommeil lourd qui aide à fuir, pour un temps, les dangers et les désarrois qui assaillent la vie. Mais un ange, c’est-à-dire un messager de Dieu le tire de son sommeil : Dieu n’aime pas l’homme écroulé, l’homme prostré, abattu par le mal comme l’arbre par la tempête ; il le tire de son sommeil et lui parle : « Lève-toi et mange ».

 « Lève-toi  » : combien de fois, Jésus lui aussi, a dit cela aux grabataires qu’on lui présentait sur leurs brancards,

– à Lazare : « Lève-toi et sors »

– à la fille de Jaïre : « Je te le dis : lève-toi »

– au fils de la veuve de Naïm : « Lève-toi ».

Se lever : c’est la position du vivant alors que l’homme couché est déjà prémonitoire de l’homme mort. Rappelez-vous l’hymne pascal : « Lève-toi, ressuscité d’entre les morts ».

Se lever, se relever, c’est le signe d’un nouveau départ.

« Lève-toi et mange » : manger est le signe que la vie est là, en train de revenir. Lorsque l’on dit d’un malade : « Ça y est ! Il s’est mis à manger ! Aujourd’hui, il a pris un petit quelque chose », c’est le signe que ça va mieux, que tous les espoirs sont permis. « Il y avait là, près de la tête d’Elie un pain cuit sur la braise et une cruche d’eau : du pain et de l’eau, le minimum vital en temps de famine.

Une deuxième fois, Elie se couche et s’endort : ne pas se croire trop vite sorti de l’épreuve. Une 1ère communion ne suffit pas : tout comme dans la journée, un seul repas ne suffit pas. Il faut recommencer : la communion fréquente. De nouveau, le messager de Dieu le touche et le fait se lever pour manger, boire donc pour vivre.

Se lever, manger et boire puis marcher : sont les actes essentiels, primordiaux du vivant. Elie, en se levant, a expérimenté dans son corps, dans sa chair, le passage, le don de Dieu : « Lève-toi et marche » après « Lève-toi et mange ».

L’Eucharistie, pour le chrétien, aura également pour but de nous mettre debout, de nous faire prendre des forces puis de repartir, nous, chrétiens, qui sommes des gens en route, des marcheurs de Dieu, des pèlerins qui ne s’arrêtent qu’à des étapes provisoires jusqu’à la grande arrivée, la grande rencontre, jusqu’à l’Horeb : la montagne de Dieu.

Oui, c’est cela un chrétien, un homme qui se lève donc un homme debout, un homme qui prend des forces que Dieu lui donne tout au long de son parcours puis qui se met en marche vers l’horizon que Dieu lui indique.

 Lui, aussi, il est souvent dans le désert.

Lui, aussi, il a faim et soif d’autre chose.

Lui, aussi, il est capable de se décourager, de chuter en route, de se coucher par terre en disant: « Seigneur, je n’en peux plus ».

Mais le Seigneur est là, invisible, qui l’accompagne, qui est à côté de lui et qui a chaque instant lui répète : « Moi, je suis le pain de vie. Au désert, vos pères ont mangé la manne et ils sont morts mais ce pain-là, qui descend du ciel, celui qui en mange ne mourra pas ! Si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement ! Le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde ».

Dans cette liturgie d’aujourd’hui, nous retrouvons les trois mots clés de la vie chrétienne : 

1Mange : le chrétien est un homme qui se nourrit et il en a besoin. Il se nourrit de la Parole de Dieu (c’est toute la 1ère partie de la messe). Il se nourrit du pain vivant descendu du ciel : le Christ qui se donne lui-même en nourriture, sa chair donnée pour la vie du monde. Il se nourrit aussi de la volonté de Dieu sur sa vie : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de mon Père ! ». Pas de vie chrétienne possible sans ces trois aliments : Parole de Dieu, pain du ciel, volonté du Père, pas plus qu’il n’y a de vie physique possible sans repas. Pas de vie spirituelle sans lecture de la Parole, communion, accueil de la volonté du Père.

Un grand malade qui ne s’alimente plus, chacun sait qu’arrive le commencement de la fin : ce n’est plus qu’une question de temps. C’est pourquoi Dieu nous dit « Mange », c’est vital, sinon tu te coupes de la vie de Dieu. Vous trouvez normal de mettre de l’essence dans votre voiture et vous savez très bien qu’elle n’avancera plus s’il n’y en a plus. C’est aussi évident et nécessaire pour la lecture de la Parole de Dieu, la communion, la volonté de Dieu dans ma vie.

Suis-je en manque de nourriture divine ? 

2Lève-toi : une fois qu’il a mangé, le chrétien retrouve des forces, il récupère de l’énergie. Alors, il peut se lever ! Rappelez-vous, lorsque vous avez été bien malade et qu’un jour, le médecin vous a dit : « Maintenant, vous allez pouvoir vous lever ».

Se tenir debout : c’est le signe du vivant. Après cette messe, nous aussi, nous allons pouvoir nous lever, partir, sortir de cette église avec une nouvelle énergie ; autrement, comme pour Elie, le chemin serait trop long, trop dur pour nous.

L’homme debout, c’est aussi le signe du Christ ressuscité, levé d’entre les morts, non plus l’homme prostré, l’homme couché dans le tombeau du Vendredi Saint. A Pâques, Il est debout, Ressuscité ! 

3 – Marche : Si nous sommes debout, ce n’est pas pour faire du sur-place ou nous tenir au « garde à vous », nous sommes debout pour marcher, pour avancer, pour poursuivre notre mission.

Chrétiens, nous sommes des voyageurs, des nomades. Nous n’avons pas à nous installer intérieurement : toujours, nous sommes en chemin, à la suite de celui qui a dit « Je suis le chemin, la voie », « Celui qui marche dans mes pas suit le chemin de la vie ». C’est ce que nous rappelle le pèlerinage. Pas des touristes ! Nous sommes des gens en marche. Sans cesse mettre un pas devant l’autre, c’est le vrai progrès, la progression vers lui, vers le but, vers la Terre Promise, vers le Royaume de Dieu.

Mange, lève-toi, mets-toi en marche : c’est ce que le Seigneur désire de nous, c’est ce qu’il nous répète de dimanche en dimanche jusqu’à la grande rencontre ! AMEN




Regards historiques sur la crucifixion de Jésus de Nazareth

         Selon l’affirmation de Rudolf Bultmann, célèbre théologien, exégète et historien allemand du XXe siècle, ce que l’on pourrait estimer de sûr quant à l’existence de Jésus de Nazareth tiendrait en à peine une page. Si, depuis cette conclusion, les recherches ont permis de faire avancer notre connaissance et nos certitudes, il est du devoir de l’historien d’admettre que peu de faits sont saisissables en dehors du prisme de la foi. Devenir spécialiste des origines du christianisme – et notamment de l’historicité de Jésus – est un pari audacieux que l’on ose par passion et conviction. S’il est un point sur lequel nous pouvons être en accord avec Bultmann et qui concilie Histoire et croyance, c’est que la crucifixion de Jésus de Nazareth est à la foi le pilier de l’identité chrétienne mais également l’événement historique le plus assuré concernant la réalité physique de son existence.

         Dans l’optique de la conférence exceptionnelle qui se tiendra le 1er septembre prochain à la Maison Diocésaine de Saint-Denis relative au Suaire de Turin, il a paru important de présenter quelques rappels historiques majeurs sur les circonstances ayant entouré le procès, la condamnation et l’exécution de Jésus de Nazareth. Il n’est pas du ressort de l’historien de traiter de la Résurrection dont la réalité si évidente pour la foi du chrétien ne peut être envisagée sous l’angle de la recherche pragmatique. Il s’agit avant tout de proposer aux participants de cette conférence des clés de compréhension permettant de saisir ce qui y sera abordé.

Un procès en deux temps

           Lorsque Jésus est arrêté au Jardin de Gethsémani, il s’agit de l’initiative des Saducéens (les prêtres du Temple de Jérusalem) dont l’origine se trouve probablement dans ce que l’on appelle communément l’ « Attentat du Temple », à savoir l’expulsion des marchands et changeurs ayant provoqué sans doute une grave crise dans l’économie du sanctuaire. Le rôle de Judas l’Iscariote est difficile à cerner et pourrait faire l’objet d’une analyse à part entière ; il n’est donc pas utile de l’aborder ici. Tout le monde sera d’accord pour reconnaitre la première phase de procès si bien décrite par Jn notamment, celle de la comparution devant Anne et Caïphe. Nous tenons ici le cœur même de cette procédure : Jésus est appréhendé sur décision du Sanhédrin pour un motif ayant trait au judaïsme de son époque. Il ne faut pas oublier que si l’autorité romaine détient seule à cette époque le droit de vie ou de mort, les prêtres ont tout à fait possibilité de statuer sur des motifs religieux en tant qu’assemblée souveraine en ce domaine. Il n’y a rien donc rien d’anormal. Le Talmud présente d’ailleurs ce procès sous l’angle d’une démarche purement doctrinale. La difficulté pour les Saducéens sera de traduire cette condamnation quasi-unanime des autorités sacerdotales en langage juridique familier au Préfet (Ponce Pilate) devant lui-même être en accord avec les impératifs de la Loi de Rome (Mos Maiorum). Celui-ci est le seul habilité à prononcer une condamnation à la peine capitale mais ne peut le faire arbitrairement, au vu du contrôle strict exercé par le pouvoir impérial sur la droiture de ses représentants. Il est important de souligner ici que l’objectif des prêtres est d’obtenir une condamnation à la crucifixion (ce sur qui nous reviendrons plus bas), châtiment très employé par les Romains bien qu’ils ne l’aient pas inventé. Deux options s’offrent alors : soit le Préfet reconnaît l’accusé coupable en vertu de la Loi romaine, soit il accepte d’accorder aux autorités du Temple le droit d’exécution de manière exceptionnelle afin d’éviter tout trouble en cette période agitée de Pâque juive (Pessah). Commence alors la seconde phase du procès, celle se déroulant devant Pilate. Avec un peu d’honnêteté intellectuelle, tout lecteur du Nouveau Testament constatera que le Préfet n’a aucun motif de prononcer une condamnation à la croix concernant Jésus. Historiquement, cela se vérifie aisément car il n’est pas passible de cette mort honnie des citoyens romains dans les textes de la Loi. Pilate ne reconnaît pas en lui un séditieux avéré (seul motif qui aurait pu s’appliquer). A Rome, la crucifixion est le châtiment des esclaves et des grands criminels ; elle n’est pas décidée à la légère et est totalement exclue dans le cadre de la condamnation d’un citoyen romain (Cicéron en sera l’un des meilleurs démonstrateurs en tant qu’avocat). Sous la pression des prêtres, Pilate finira par opter pour la seconde solution : livrer l’accusé en autorisant les gardes du Temple à procéder à l’exécution. Mais pourquoi avoir réclamé à grands cris la croix alors que la peine qui aurait du être appliquée (toujours selon le Talmud) est la lapidation ?

Le châtiment et l’exécution de Jésus : retour sur un événement obscur

           Selon Deutéronome 21, 23, celui qui est pendu sur le bois (comprenons crucifié) est maudit. Cela implique dans le judaïsme du Ier siècle un effacement total de la mémoire du condamné devenu impur aux yeux de l’Eternel. En ce qui concerne Jésus, on aperçoit alors aisément l’utilité d’une telle exécution : l’enseignement dispensé par le maître deviendra caduc. La portée symbolique est d’une importance considérable. Certains ont rétorqué pendant longtemps que la croix était un supplice totalement romain dans ces contrées (Flavius Josèphe racontera son utilisation intensive par le général et futur Empereur Titus lors du siège de Jérusalem en 70 ; on peut également citer les nombreuses mises en croix épisodiques de Zélotes par les soldats ou, bien avant, les 2000 crucifiés par ordre du légat Varus à la mort d’Hérode le Grand). En réalité, il a été clairement démontré que la croix était utilisée par les autorités judéennes (notamment par Emile Puech, professeur à l’Ecole Biblique et Archéologique Française de Jérusalem). En définitive, Pilate n’est responsable que de deux faits : la flagellation (prescrite pour corriger un trublion) et la crucifixion des brigands relevant bel-et-bien de l’autorité impériale cette fois. C’est ce qui expliquera la présence de soldats romains au pied de la croix lorsque Jésus expire. Le Suaire de Turin montre effectivement l’image d’un homme indubitablement crucifié à la manière antique ; s’il s’agit de Jésus de Nazareth, nous sommes probablement en présence d’un témoignage unique de crucifixion judéenne. On peut néanmoins remarquer sur le corps de l’homme les nombreuses marques de flagellation. Extrêmement rigoureux et codifié, ce supplice pouvait effectivement coûter la vie à celui qui y était soumis. Les bourreaux utilisaient un flagrum, fouet à plusieurs lanières de cuir terminées par des éclats de plomb ou d’ossements destinés à déchirer les chairs du malheureux. La perte de sang devait être importante, ce qui explique l’état de faiblesse de Jésus lors du sinistre parcours vers le Golgotha. Pilate ayant concédé aux autorités sacerdotales la permission de mettre à mort l’accusé, Jésus sera placé dans le cortège expédiant deux autres « larrons » à la mort. Il porte alors le patibulum, c’est-à-dire la poutre transversale du gibet et non la croix dans son intégralité (nous le savons par les dires de nombreux auteurs antiques). Sur ce qui se passe au lieu de l’exécution, les évangiles sont extrêmement peu clairs. C’est en 1968 que des archéologues retrouveront auprès de Jérusalem les ossements d’un homme crucifié et établiront le déroulement probable de la mise à mort. Au début du siècle dernier, un médecin bien connu – le Dr Barbet – avait déjà abouti à de solides conclusions, confirmées par la découverte des ossements mais aussi le Suaire. Jésus a certainement été cloué sur le patibulum par les poignets (voire entre les os de l’avant bras) et ensuite hissé sur la poutre verticale (appelée stipes et plantée en permanence sur le lieu des supplices). La section du nerf médian au poignet entraine chez le condamné la rétraction incontrôlable du pouce au cœur de la paume ; ceci explique certainement le fait que l’homme du Suaire ne possède que quatre doigts visibles à chaque main… Ceci n’est qu’un exemple des multiples détails révélés par l’analyse minutieuse de la relique. Les pieds sont ensuite eux-mêmes cloués (le crucifié retrouvé en 1968 avait été fixé par les talons, le clou étant encore fixé dans son calcaneum). Le mort se produit ensuite par lente asphyxie, le crucifié devant se hisser pour respirer et donc s’appuyer sur ses blessures. L’agonie est estimée à une dizaine d’heures en moyenne avant que l’effort intense ne provoque une tétanie complète du corps et une incapacité à reprendre son souffle. Les évangiles relatent une période de six heures avant que Jésus meure ; Mc évoque d’ailleurs un épisode unique, celui de Pilate s’étonnant d’une mort aussi rapide. De nombreuses théories ont été évoquées, toutes défendables : arrêt cardiaque, rupture d’anévrisme, accélération de la mort par le fait d’avoir bu la boisson vinaigrée, apoplexie… On remarque que l’homme du Suaire, de même que Jésus, n’a pas subi le crurifragium ou brisement des jambes bien connu par les sources antiques, destiné à abréger les souffrances en provoquant une asphyxie quasi-instantanée. En revanche, une plaie rappelant une lance plate (lancea) est bien visible au côté gauche. Selon Jn, il en coula du sang et de l’eau ; effectivement, porté dans la région de la plèvre et du péricarde, il a été constaté que la blessure transperce une zone contenant un important œdème très certainement accentué par les efforts fournis par le supplicié. Restent les coulées de sang au front rappelant sans équivoque les épines de la couronne de dérision, détail totalement propre à l’exécution de Jésus. On pourrait également évoquer les ecchymoses, tuméfactions et traumatismes divers. Constatation ultime : l’homme n’a pas été laissé à la merci des oiseaux de proie ou des chacals, sort hélas ordinaire des cadavres abandonnés sur les croix. Deux pièces de monnaie ont été posées sur ses yeux lors de sa probable mise au tombeau, conformément à l’usage du Ier siècle. On est bien entendu tentés de reconnaître ici l’intervention de Joseph d’Arimathie ayant évité au maître de connaître le sort des condamnés anonymes. On peut également y voir l’impératif de la Pâque nécessitant un retrait rapide des corps en vertu de la Loi de Moïse. L’homme a été mis au sépulcre à la manière attestée dans les coutumes judéennes de l’époque. Mais nous entrons à présent dans un mystère qui n’est plus du ressort de l’historien et vit pleinement dans le cœur du croyant : celui du troisième jour.

         Abordé ici de manière succincte – voire lapidaire, l’épisode de la mort de Jésus est aux yeux de l’historien un événement de première importance. Il faut souligner qu’il est le seul datable avec précision (même si cela ne demeure pas sans polémiques). La présentation ici réalisée n’a qu’un objectif : donner au croyant des éléments de réponse et de compréhension, que ce soit pour la conférence qui se tiendra prochainement mais aussi pour sa réflexion de tous les jours. Le Suaire de Turin est un témoignage unique et presque insaisissable du lien existant entre la foi et l’étude des faits. Les deux ne sont pas contradictoires. L’Histoire n’a pas pour vocation de détruire la foi. L’Histoire nourrit la foi. Elle a consolidé la mienne…

Yannick Leroy




« La Didaché », par Yannick Leroy

Peu de textes concernant le Ier siècle et les racines de la foi chrétienne sont parvenus jusqu’à nous en dehors des écrits contenus dans le Nouveau Testament. Un ouvrage fut pourtant mentionné dans l’Histoire Ecclésiastique d’Eusèbe de Césarée (IVe siècle) ainsi que dans de nombreuses listes anciennes se référant au Canon. Il s’agit de la Didachè, manuel à l’intention des premiers fidèles, se réclamant de l’autorité des douze Apôtres. Rédigé à la fin du Ier siècle, probablement en Syrie ou Palestine, ce précieux opuscule n’avait jamais mis au jour jusqu’en 1873 lorsqu’il fut découvert par le Métropolite Philothée Bryennios de Nicomédie dans la bibliothèque du Patriarcat Grec de Jérusalem sur une copie réalisée en 1056 et contenant également l’intégralité du texte de l’Epître de Barnabé. Rédigée en grec, la Didachè se présente effectivement sous forme d’un cours ouvrage mettant en avant l’enseignement des Douze à l’intention du croyant, à travers des préceptes moraux directement inspirés des racines judéennes de la foi dans le Christ. Son titre signifie « enseignement » ou « doctrine » ; l’ouvrage existe d’ailleurs également en latin, dans une version légèrement différente, sous l’appellation Doctrina Duodecim Apostolorum. Fondée sur un écrit très ancien appelé Les Deux Voies (Duae Viae) et perdu depuis longtemps, l’œuvre s’organise sur la distinction essentielle entre le chemin de la lumière et le chemin des ténèbres afin d’orienter le Chrétien sur la juste attitude à adopter dans l’attente de la Parousie. Bien que non intégrée au sein du Canon de l’Eglise Catholique, la Didachè n’a jamais été considérée comme ouvrage déviant et bénéficie jusqu’à nos jours d’une large estime de la part des milieux ecclésiastiques. Il convient de préciser qu’elle fut d’ailleurs incluse parmi les écrits canoniques par certaines des premières listes d’ouvrages reçus comme tels. Son statut est par ailleurs celui d’un écrit inspiré reconnu par l’autorité pontificale jusqu’à notre époque. Sa lecture révèle au croyant la profondeur de la foi des premiers Pères et démontre une incroyable actualité des propos choisis pour nourrir l’espérance intemporelle de ceux qui placent leur cœur dans le Christ.

Bibliographie élémentaire

• La Doctrine des Douze Apôtres, W. Rordorf (éd. et trad.), Sources Chrétiennes, Le Cerf, Paris, 1998
• AUDET, J.-P., La Didachè, instructions des Apôtres, Etudes Bibliques, Gabalda, Paris, 1958

Extraits

Il y a deux chemins : l’un de la vie, l’autre de la mort ; mais il est entre les deux chemins une grande différence. Or le chemin de la vie est le suivant : d’abord, tu aimeras Dieu qui t’a créé ; en second lieu, tu aimeras ton prochain comme toi-même ; et ce que tu ne veux pas qu’il te soit fait, toi non plus ne le fais pas à autrui. Et voici l’enseignement signifié par ces paroles : « Bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour vos ennemis, jeûnez pour ceux qui vous persécutent. Quel mérite, en effet, d’aimer ceux qui vous aiment ! Les païens n’en font-ils pas autant ? Quant à vous, aimez ceux qui vous haïssent », et vous n’aurez pas d’ennemis. Abstiens-toi des désirs charnels et corporels. Si quelqu’un te donne un soufflet sur la joue droite, présente lui l’autre aussi, et tu seras parfait ; si quelqu’un te requiert de faire un mille, fais-en deux avec lui ; si quelqu’un t’enlève ton manteau, donne-lui encore ta tunique ; si quelqu’un t’a pris ton bien, ne le réclame pas, car tu n’en as pas le pouvoir. Donne à quiconque t’implore, sans rien redemander, car le Père veut qu’il soit fait part à tous de ses propres largesses. Heureux celui qui donne, selon le commandement car il est irréprochable. Malheur à celui qui reçoit ! Certes si le besoin l’oblige à prendre, il est innocent ; mais, s’il n’est pas dans le besoin, il rendra compte du motif et du but pour lesquels il a pris ; il sera mis en prison, examiné sur sa conduite et il ne sortira pas de là qu’il n’ait rendu le dernier quart d’as. Mais il a été dit également à ce sujet : « Laisse ton aumône se mouiller de sueur dans tes mains, jusqu’à ce que tu saches à qui tu donnes ».
Didaché I, 1-6

Mon enfant, souviens-toi nuit et jour de celui qui t’annonce la parole de Dieu ; honore-le comme le Seigneur, car là où est annoncée sa souveraineté, là est aussi le Seigneur. Recherche tous les jours la compagnie des Saints, afin de te réconforter par leurs conversations. Tu ne feras point de schisme, mais tu mettras la paix entre ceux qui se combattent. Tu jugeras avec justice ; tu ne feras pas acception de la personne en reprenant les fautes. Tu ne demanderas pas avec inquiétude si une chose arrivera ou non. Ne tiens pas les mains étendues quand il s’agit de recevoir, et fermées quand il faut donner. Si tu possèdes quelque chose grâce au travail de tes mains, donne afin de racheter tes péchés. Ne balance pas avant de donner, mais donne sans murmure et tu reconnaîtras un jour qui sait récompenser dignement. Ne repousse pas l’indigent, mets tout en commun avec ton frère et ne dis pas que tu as des biens en propre, car si vous entrez en partage pour les biens immortels combien plus y entrez-vous pour les biens périssables ?
Didachè, IV, 1-8




18ième Dimanche du Temps Ordinaire – par Francis COUSIN (Jn 6, 24-45)

 

Évangile selon saint Jean 6, 24-35

 

« L’œuvre de Dieu,

c’est que vous croyez à celui qu’il a envoyé. »

 

Tout au long de l’évangile de ce jour, on va voir une incompréhension entre ce que dit et fait Jésus et ce que comprennent les juifs.

Les juifs sont à la recherche de Jésus car ils voulaient « l’enlever pour faire de lui leur roi » (Jn 6,15), un roi terrestre qui pourrait les libérer de l’occupation romaine. Et quand ils le trouvent, Jésus leur reproche de ne pas avoir vu de « signes » dans ce qu’il avait fait auparavant : les guérisons, l’eau changé en vin, les pains multipliés … Ils avaient vu les faits, mais sans réfléchir au pourquoi de ces faits, leurs significations, de quoi étaient-ils le symbole.

Et rappelant la journée précédente, il fait la différence entre ‘la nourriture qui se perd’  et ‘la nourriture qui demeure’.

On retrouve deux mots courants chez Jean : recherche et demeurer. On les a déjà vus dans le chapitre 1, quand André et un autre disciple suivent Jésus : « Que cherchez-vous ? » demande Jésus ; « ils allèrent … virent où il demeurait, et ils restèrent auprès de lui… » (v. 38-39). Eux étaient des chercheurs de Dieu, sont allés à sa rencontre en le suivant, l’ont écouté, ont ouvert leur cœur à sa Parole, et ont vu où il demeurait et sont restés avec lui, ont demeuré avec lui. Mais c’étaient des chercheurs de Dieu, de la transcendance … Et ils ont cru en Jésus.

Ce qui n’était pas le cas des juifs qui ne cherchaient qu’à manger gratuitement. Ils cherchaient le pain matériel, et non le pain spirituel, la Parole de Dieu, un pain qui nous amène plus loin, jusque dans la vie éternelle.

Alors, quand Jésus parle de ce pain ‘qui dure’, que leur « donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. », ils sont d’accord qu’on leur donne un pain qui dure pour toute la vie, ils sont prêts à tous : « Qu’est-ce qu’on doit faire ? » Ils avaient déjà dans la loi quelques 613 commandements à respecter, alors quelques uns de plus pour « les œuvres de Dieu », quelques actions  à faire … Cela ne les dérange pas. Ils sont dans le domaine de la loi, des pratiques, du permis et du défendu.

Mais Jésus leur répond au singulier : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyez à celui qu’il a envoyé. ». Il ne s’agit plus de faire … mais de croire.

« Oui, d’accord, on veut bien te croire, mais quel signe vas-tu accomplir pour que nous pussions te croire ? »

Un signe ?! Une preuve ! Eux qui avaient bénéficié de la multiplication des pains la veille, ils n’ont pas compris que c’était déjà un signe de la puissance de Dieu qui donne gratuitement. Pourtant, ils connaissaient les écritures : « Venez acheter et consommer, … sans argent, sans rien payer. Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas ? Écoutez-moi bien, et vous mangerez de bonnes choses, vous vous régalerez de viandes savoureuses ! » (Is 55,1-2). Et Isaïe est bien un prophète reconnu, envoyé par Dieu ! Mais ils sont dans leur monde, marqué par la loi de Moïse ; et c’est en référence à Moïse qu’ils parlent de la manne, le pain venu du ciel. Ils attendent peut-être un signe supérieur à celui de la manne !

Mais Jésus remet les pendules à l’heure : « ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel … et qui donne la vie au monde. ».

Là, c’est sûr que Jésus les embrouille. Ils ne comprennent plus rien. Un pain, qui vient du ciel, donné, gratuit, qui donne la vie au monde ! Ils sont preneurs : « Donne-nous toujours de ce pain-là. ».

« Moi, je suis le pain de la vie. », « Ego eimi … » Jésus utilise la même expression que Dieu a utilisée quand il s’est fait connaître à Moïse. C’est le bouquet ! Déjà Jésus parle de Dieu en disant ‘mon Père’, et maintenant il s’approprie le nom de Dieu !  Ils ne comprennent plus.

Vraiment, les pensées de Dieu ne sont pas les pensées des hommes.

Et c’est encore vrai maintenant !

Nous avons bien du mal à comprendre la pensée de Dieu.

Nous aussi, nous devons passer des œuvres à faire pour ’’gagner le ciel’’, à faire l’œuvre de Dieu : croire en celui qu’il a envoyé : Jésus le Christ. Passer des ‘pratiques’, des actions, qui ne sont certes pas mauvaises, qui sont mêmes nécessaires (cf Jc 2,17), mais qui ne sont pas suffisantes : l’essentiel, c’est de croire en Dieu, croire que Jésus est le Fils de Dieu, ouvrir notre cœur humain à l’amour de Dieu pour qu’il puisse y pénétrer, y demeurer, « lui près de nous, et nous près de lui » (cf Ap 3,20). Que nous mettions en œuvre la Parole de Jésus dans les évangiles qui est amour, humilité, service …

« Ce ne sont pas les diverses espèces de fruits qui nourrissent l’homme, mais c’est ta parole qui conserve ceux qui croient en toi. » (Sg 16,26).

Seigneur Jésus,

souvent nous n’avons pas le temps de penser à toi

car nous sommes occupés par ‘nos affaires’,

et quand on pense à toi,

nous voulons faire quelque chose, des œuvres …

Mais ce que tu veux,

c’est que nous croyons en toi, en ton Père, en l’Esprit.

Et que nous écoutions ta Parole …

avec notre cœur !

Francis Cousin

 

Pour accéder à cette prière et à son illustration cliquer sur le titre suivant : Prière dim ord B 18° A6