17ième dimanche du Temps Ordinaire (Mt 13, 44-52) – Claude WON FAH HIN

L’Évangile d’aujourd’hui nous parle de paraboles, celle du trésor caché, des perles fines et du filet. Une parabole est un genre littéraire qui permet de faire une sorte de comparaison en prenant dans la vie courante des faits ou des exemples qui vont nous amener à mieux connaître le Royaume de Dieu ou le monde de Dieu. A première vue, les deux premières paraboles ont l’air de se ressembler : quelqu’un découvre un trésor ou des perles, il s’en va vendre tout ce qu’il a et achète soit le champ qui contient le trésor, soit les perles fines. Dans les deux cas, la personne s’est dépouillée de tous ses biens pour quelque chose qui dépasse en valeur tous leurs biens et ce quelque chose c’est le Royaume de Dieu. Le Royaume de Dieu vaut bien plus que toutes les richesses du monde. Une différence entre les deux, c’est que dans le premier cas, celui du trésor caché dans un champ, l’homme l’a découvert par hasard, autrement dit, une personne peut, au hasard de la vie, découvrir le Royaume de Dieu sans même qu’il ait passé toute sa vie à le chercher. Et maintenant qu’il a découvert ce trésor, il va tout faire pour garder ce trésor qu’est le Royaume de Dieu, un Royaume qui se vit aujourd’hui, de notre vivant. Pas besoin d’attendre après la mort !–

Dans le deuxième cas, celui du négociant, ce dernier est en quête de perles fines, il les a cherchées et une fois qu’il en a trouvé une de grand prix, il va tout vendre pour l’acheter. Là aussi, la perle fine, autrement dit le Royaume de Dieu vaut bien plus que tous ses biens. Mais lui, il ne l’a pas trouvée par hasard, il a passé toute sa vie à la chercher et a fini par la trouver. Ainsi, il y a des gens qui trouvent le Royaume de Dieu sans l’avoir cherché et d’autres après l’avoir cherché longuement.

Dans les deux cas, après avoir trouvé, l’un et l’autre s’en vont pour vendre leurs biens. Dans cette expression « il s’en va ravi de joie vendre tout ce qu’il possède », existe déjà l’idée de « transformation » psychologique, de changement intérieur, de passage d’un état à un autre, de conversion même car au bout c’est l’espérance de posséder ce trésor ou cette perle fine de grand prix, c’est l’espérance non pas d’avoir ce Royaume de Dieu, – car personne ne peut posséder le Royaume de Dieu – mais de vivre au plus vite dans ce Royaume de Dieu. On imagine bien la joie des deux : l’un s’en va de joie vendre tout ce qu’il possède , et l’autre a trouvé « une perle de grand prix ». C’est à la fois le désir de l’objet de valeur et cette joie qui d’abord les transforment intérieurement puis les confirment dans leur décision de tout vendre pour ce plus grand trésor ou cette perle de grande valeur. La vente de tout ce qu’ils ont vient donc dans cette joie et ce désir, et non pas d’une obligation. Et nous pouvons alors comprendre tous ces gens qui ont tout abandonné pour Dieu, à l’exemple de Dieu qui a donné sa vie pour sauver l’humanité entière. Autrement dit, dans les deux cas, pour avoir le Royaume de Dieu, ils ont fait le sacrifice de leur vie pour faire le choix de Dieu en toute liberté. Ils ne l’ont pas fait pour s’enrichir davantage, mais pour commencer à vivre, dès que possible, le Royaume de Dieu, déjà ici, sur terre. Mt 5,3 : « Heureux ceux qui ont une âme de pauvre, car le Royaume des Cieux est à eux » et Lc 6,20 : « Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous », et dans les deux cas, le verbe est au présent.

Sur un autre plan, l’Évangile nous dit que le trésor et les perles sont semblables au Royaume de Dieu, et donc ils ne sont pas le Royaume, mais juste semblables, car le Royaume de Dieu ne s’achète pas, et c’est un don de Dieu qui nous l’accorde par miséricorde. Le fait de vendre tous ses biens nous fait aborder ici la notion du détachement, du dépouillement de soi pour faire le choix de Dieu, puisqu’on ne peut pas « servir Dieu et l’argent » (Mt 6,24). Et quand on parle du détachement de « tout », cela signifie que Dieu est premier dans sa vie, bien avant les biens matériels et immatériels comme les honneurs, le pouvoir, la reconnaissance. Tout le monde peut donc trouver le Royaume de Dieu, par grâce de Dieu. Dans un cas, il n’y a pas obligation d’une recherche effrénée, démesurée, de ce Royaume et de l’autre, il ne s’agit pas non plus d’attendre passivement que la découverte ait lieu tout seul. Ainsi donc, toute personne, tout en ayant ses activités quotidiennes, doit malgré tout faire quelques efforts à la recherche de Dieu et ne pas attendre les bras croisés, alors même que nous savons que Dieu n’arrête de nous faire signe à chaque instant de notre vie. Tous sont appelés à cheminer vers ce Royaume.

Le côté « caché » du trésor qu’est le Royaume de Dieu montre que ce dernier n’est pas visible pour tous, d’où la nécessité de répandre la Parole de Dieu, d’évangéliser jusqu’aux extrémités de la terre, mais les « cœurs purs » le verront : « Heureux les cœurs purs, ils verront le Royaume de Dieu » (Mt 5,8).

– Les deux premières paraboles ont mis l’accent sur le fait que les deux personnages ont tout fait pour avoir leur trésor, mais une fois que ce trésor et que cette perle de grand prix ont été acquis, les deux personnages ne peuvent plus rester les bras croisés. Le filet jeté, dont parle la troisième parabole, peut ramener du bon et du mauvais. Elle rejoint la parabole de l’ivraie qui vient juste avant l’Évangile d’aujourd’hui. Parmi les chrétiens qui vivent dès à présent le Royaume de Dieu sur terre, il y en a qui agissent mal dans ce Royaume, cherchant à diviser plutôt qu’à unir, à évincer d’autres chrétiens comme si c’était des concurrents, à ne regarder que leur nombril comme on dit, s’opposant par la même occasion à l’œuvre de Dieu alors qu’ils sont au service de l’Eglise, faisant le jeu de l’Esprit du mal qui se plait dans la division, dans les colères des uns et des autres, dans les affrontements des chrétiens entre eux. Ce genre de comportement ne vient pas de Dieu et c’est la raison pour laquelle, tous, nous devons nous observer nous-mêmes pour nous convertir pleinement à la grâce de Dieu, selon les paroles du Christ : « aimez-vous les uns les autres ». « A la fin de l’âge, à la fin des temps, les anges se présenteront et sépareront les méchants d’entre les justes 50 pour les jeter dans la fournaise ardente : là seront les pleurs et les grincements de dents » Et la question est posée : « avez-vous compris cela ? » (v.51). Réfléchissez bien à ces paroles du Christ lui-même qui a parlé en paraboles et s’il le faut, faites un virage à 180° pour changer de cap, car c’est bien « la fournaise ardente » qui attende ceux ou celles qui ne veulent rien entendre, s’opposant sans cesse à la volonté de Dieu. Si des chrétiens ne savent pas ce qu’est l’enfer ou n’y croient pas, rien n’est plus facile de faire une conférence sur ce thème et le leur décrire avec assez de références des visions fournies par des saints et des saintes. On peut même vous citer des noms de grands personnages qui s’y trouvent déjà. « Le sort des méchants est irrémédiable » nous dit Claude Tassin. « Ceux qui ont eu la grâce de découvrir la perle et le trésor sont inexcusables de ne point agir en conséquence ». Nous ne pouvons pas dire que nous n’étions pas au courant que les anges jetteront les méchants dans la fournaise ardente. En réalité, c’est l’âme elle-même qui, se voyant particulièrement sale, à la mort de la personne, va se jeter directement en Enfer.

C’est maintenant qu’il faut se convertir, se repentir et changer de direction pour plaire à Dieu et faire sa volonté, pas la nôtre. Dieu lui-même veut que tout le monde soit sauvé. Encore faut-il mettre en pratique la parole de Dieu et ne pas s’opposer à son œuvre de paix et d’unité, en formant un seul Corps qu’est l’Eglise. « Avec ceux qu’il aime, Dieu collabore en tout pour leur bien ». Dieu aime tout le monde mais l’inverse n’est pas toujours vrai. Comment voulez-vous aimer Dieu si on ne s’entend avec personne de son entourage ? Si tout le monde se plaint de moi, c’est que j’ai une manière d’être ou de faire qui ne plaît pas à tout le monde. Si c’est avec une seule personne, on peut mettre la faute sur l’autre mais pas quand c’est envers tout le monde. Je dois donc chercher ce qui ne va pas en moi et me changer avec la grâce de Dieu. Car Dieu qui aime tout le monde, collabore en tout pour leur bien. Dieu peut nous changer. Il suffit de lui demander de nous changer, et y insister jusqu’à ce qu’il nous exauce. Il ne refuse jamais quand il s’agit du bien des gens. Il faut lui faire confiance car il nous a prédestinés à reproduire l’image de son fils afin de nous rendre justes devant Dieu. Tout est possible. Le jeune Salomon, lui, a demandé, non pas la richesse, ni vivre longtemps, ni même la vie de ses ennemis, mais un cœur plein de jugement pour bien gouverner son peuple, pour discerner entre le bien et le mal. Comme Salomon, bien des chrétiens ne savent pas distinguer le bien du mal. Et quand on pense bien faire, on fait le mal, parfois même sans s’en apercevoir. Paul lui-même dit à un certain moment en Rm 7,19 : « je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas ». C’est pourquoi, divers passages bibliques insistent sur la correction fraternelle. Ap 3,19 : « Ceux que j’aime, je les semonce et les corrige. Allons! Un peu d’ardeur, et repens-toi! » – He 12,5 : « Mon fils, ne méprise pas la correction du Seigneur, et ne te décourage pas quand il te reprend » – Ga 6,1 : « Frères, même dans le cas où quelqu’un serait pris en faute, vous les spirituels, rétablissez-le en esprit de douceur, te surveillant toi-même, car tu pourrais bien toi aussi être tenté ». Salomon, lui, a demandé le discernement du jugement, c’est-à-dire la capacité d’apprécier les situations de la vie pratique pour pouvoir déterminer la bonne conduite à avoir, le tout… fait en vérité selon la parole de Dieu qui nous demande de nous aimer les uns les autres.

Rien de mieux pour combattre nos propres fautes, nos propres péchés, que de demander à Dieu, dans toutes nos prières, le discernement des tentations afin de pouvoir détecter, avec la grâce de Dieu, les moments de tentation de l’esprit du mal et demander en même temps la force de repousser ces tentations une fois qu’elles ont été détectées. Dieu ne pourra pas nous les refuser et Jacques nous le rappelle (Jc 1,5-7) : « 5 Si l’un de vous manque de sagesse, qu’il la demande à Dieu ­ il donne à tous généreusement, sans récriminer ­ et elle lui sera donnée. 6 Mais qu’il demande avec foi, sans hésitation, car celui qui hésite ressemble au flot de la mer que le vent soulève et agite. 7 Qu’il ne s’imagine pas, cet homme-là, recevoir quoi que ce soit du Seigneur ». Et Jacques qui connaît les hommes insiste pour nous faire connaître la bonne conduite à tenir pour plaire à Dieu (Jc 3,13-18) : « 13 Est-il quelqu’un de sage et d’expérimenté parmi vous? Qu’il fasse voir, par une bonne conduite, des actes empreints de douceur et de sagesse. 14 Si vous avez au cœur, au contraire, une amère jalousie et un esprit de chicane, ne vous vantez pas, ne mentez pas contre la vérité. 15 Pareille sagesse ne descend pas d’en haut: elle est terrestre, animale, démoniaque. 16 Car, où il y a jalousie et chicane, il y a désordre et toutes sortes de mauvaises actions. 17 Tandis que la sagesse d’en haut est tout d’abord pure, puis pacifique, indulgente, bienveillante, pleine de pitié et de bons fruits, sans partialité, sans hypocrisie. 18 Un fruit de justice est semé dans la paix pour ceux qui produisent la paix ». Un peu plus loin, il nous dit (Jc 4,6) : « Dieu résiste aux orgueilleux, mais se montre favorable aux humbles ». Savoir discerner le bien du mal en nous-mêmes pourrait nous amener à une certaine sagesse, à un certain dépouillement de tout ce qui peut nous amener à des fautes ou à des péchés qui nous conduisent toujours à la division. Il nous faut travailler à l’unité, à la paix, à la fraternité, non seulement au sein de l’Eglise, mais partout dans le monde.

Le CEC 775 nous dit en trois fois dans le même paragraphe : « 1) L’Église est, dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et l’instrument de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain ; 2) l’Église est aussi le sacrement de l’unité du genre humain ; 3) l’Église est  » signe et instrument  » de la pleine réalisation de cette unité qui doit encore venir ». Saint Paul aussi prend au sérieux les problèmes de désunion (Rm 14,13): « Cessons donc de nous juger les uns les autres. Jugez plutôt qu’il ne faut pas être pour un frère cause de chute ou de scandale ». Tout scribe – c’est-à-dire, selon la note de la TOB, tout auditeur qui a compris l’enseignement du Christ – devenu disciple du Royaume des Cieux est semblable à un propriétaire qui tire de son trésor du neuf et du vieux. Du vieux, nous pouvons garder ce qu’il y a de meilleur en nous, mais il faudra certainement y mettre du neuf avec les enseignements du Christ afin que nous soyons  convertis et transformés à l’image du Christ comme nous le dit Saint Paul (Tt 3,3-5) : « 3…nous aussi, autrefois, nous étions insensés, rebelles, égarés, asservis à toutes sortes de désirs et de plaisirs, vivant dans la méchanceté et l’envie, odieux et nous haïssant les uns les autres. 4 Mais lorsque se sont manifestés la bonté de Dieu notre Sauveur (dans nos cœurs) et son amour pour les hommes, il nous a sauvés, non en vertu des œuvres que nous aurions accomplies nous-mêmes dans la justice, mais en vertu de sa miséricorde, par le bain de la nouvelle naissance et de la rénovation que produit l’Esprit Saint ». Que notre sainte Mère prie pour que nous ayons nous aussi le discernement du bien et du mal et veille à l’unité et à la paix chez ses enfants.

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