24ième Dimanche du Temps Ordinaire (Mt 18, 21-35) – Homélie du Père Rodolphe EMARD

Lectures : Si 27, 30 – 28, 7 ; Mt 18, 21-35

 

La première lecture et l’Évangile de ce dimanche abordent la question du pardon. Le commandement du pardon est bien manifeste dans l’Ancien Testament (première lecture) : « Pardonne à ton prochain le tort qu’il t’a fait ; alors, à ta prière, tes péchés seront remis. » Jésus ne fera qu’accomplir ce commandement, en le menant à sa perfection. Suivre Jésus, c’est désormais sortir de la loi du talion, « œil pour œil, dent pour dent ».

La réponse de Jésus à la question de Pierre, dans l’Évangile, va bien dans ce sens : « Seigneur, lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? » Jésus lui répondit : « Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à 70 fois sept fois. » Le chiffre sept dans la Bible est symbolique, il exprime la perfection. Nous devons pardonner indéfiniment…

Le terme « pardon » vient du latin per qui exprime l’idée de perfection et de donare qui signifie « donner ». Littéralement, le pardon est le don parfait. Le pardon vient de Dieu car Dieu est miséricordieux. La miséricorde exprime une attitude de l’être profond de Dieu qui remue comme aux entrailles. Dieu rejette le péché mais pas le pécheur. Sa miséricorde le pousse à agir pour secourir l’homme égaré. Jésus est l’incarnation de ce Dieu miséricordieux, le bon Pasteur.

De ce fait, le pardon est un devoir à accomplir. Il nous faut prendre le chemin de la réconciliation. Un chemin qui peut être long et plus difficile selon les cas… il n’y a pas de recette toute faite dans le chemin de la réconciliation mais nous pouvons souligner huit caractéristiques à considérer dans toutes les situations :

  • C’est d’abord une grâce à demander au Seigneur. C’est Dieu qui fera ce travail de pardon dans nos cœurs.

  • Pardonner ne signifie pas oublier. Le pardon n’est pas l’amnésie. Nous ne pouvons pas non plus faire semblant d’avoir oublié.

  • Il faut éviter de ressasser les évènements. Ressasser n’aide pas à la réconciliation. Ressasser alimente la douleur, la rancune, la colère et la haine. Ben Sira le Sage nous met en garde contre ces sentiments destructeurs : « Rancune et colère, voilà des choses abominables
    où le pécheur est passé maître. (…) Pense à ton sort final et renonce à toute haine, (…) Pense aux commandements et ne garde pas de rancune envers le prochain, (…) et sois indulgent pour qui ne sait pas. ».

  • Consentir à la rude épreuve de la patience. La réconciliation se fait sur le temps… Il faut opter pour la patience envers les autres mais aussi, en premier lieu, la patience envers soi-même.

  • Il faut sans cesse prier comme nous le demande Jésus : prier pour nos ennemis, nos persécuteurs, ceux qui nous haïssent et nous maudissent. La prière nous permet de recevoir la force de Dieu pour entreprendre le chemin de la réconciliation.

  • Faire la vérité sur les faits. Il est bon de reconnaître la responsabilité de l’autre mais sans occulter ou minimiser sa propre responsabilité. Cela est nécessaire pour un vrai acte de pardon.

  • Vivre le sacrement du pardon. Ce sacrement peut vraiment nous apporter une résurrection spirituelle. Le sacrement du pardon permet de parler de sa(ses) blessures, de recevoir des conseils et de discerner les appels de Dieu.

  • Consentir que notre démarche de réconciliation puisse être refusée par l’autre, même si dans les faits, nous ne sommes pas nos torts. Aussi dur que sera ce refus, nous aurons accompli ce que demande l’Évangile. Cela nous apportera une sérénité et une paix car nous aurons vécu le commandement du pardon jusqu’au bout. Poser cet acte dépend de chacun de nous en nous rappelant que le refus du pardon restera l’affaire de l’autre avec le Seigneur. Nous serons ainsi en accord avec notre conscience.

Ces quelques caractéristiques nous rappellent que pour entreprendre le chemin de la réconciliation, il nous faut faire preuve de beaucoup de compassion, d’indulgence, non pas comme le mauvais serviteur de la parabole. Il a pourtant bénéficié de la compassion de son maître mais il n’est pas capable d’en faire preuve envers son compagnon qui lui devait de l’argent, un cœur sans pitié. Ne relativisons pas trop vite nos duretés de cœur, Jésus nous met en garde : « C’est ainsi que mon Père du ciel vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère du fond du cœur. »

Les lectures de ce dimanche nous alertent sur le commandement du pardon. Aussi dure qu’il soit, il n’est pas impossible et c’est une exigence pour entrer dans le royaume des Cieux. Nous serons jugés sur les actes de miséricorde que nous aurons posés. C’est la grâce que nous demandons au Seigneur au cours de cette Eucharistie, que nous soyons davantage enveloppés de la compassion de Dieu envers notre prochain.

Pour conclure, rappelons-nous que pour pouvoir pardonner, il faut tout d’abord faire l’expérience du pardon de Dieu dans nos propres vies. C’est la base pour pouvoir vivre la réconciliation avec les autres. Et ce n’est pas non plus sans rappeler la nécessité de se pardonner soi-même en vue d’un vrai acte extérieur de réconciliation.

Seigneur Jésus, apprends-nous à pardonner. Nous te confions ces chemins de réconciliation encore difficiles à entreprendre. Fais que nous ressentions l’effet de ton pardon dans nos vies et donne-nous des cœurs plus compatissants et plus miséricordieux, des cœurs semblables au tien. Amen.

image_pdfimage_print

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Question antispam * Time limit is exhausted. Please reload the CAPTCHA.

Top