25ième Dimanche du Temps Ordinaire – par le Diacre Jacques FOURNIER

« La logique de l’Amour »

(Mt 20,1-16)

  En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples cette parabole : « En effet, le royaume des Cieux est comparable au maître d’un domaine qui sortit dès le matin afin d’embaucher des ouvriers pour sa vigne.
Il se mit d’accord avec eux sur le salaire de la journée : un denier, c’est-à-dire une pièce d’argent, et il les envoya à sa vigne.
Sorti vers neuf heures, il en vit d’autres qui étaient là, sur la place, sans rien faire.
Et à ceux-là, il dit : “Allez à ma vigne, vous aussi, et je vous donnerai ce qui est juste.”
Ils y allèrent. Il sortit de nouveau vers midi, puis vers trois heures, et fit de même.
Vers cinq heures, il sortit encore, en trouva d’autres qui étaient là et leur dit : “Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?”
Ils lui répondirent : “Parce que personne ne nous a embauchés.” Il leur dit : “Allez à ma vigne, vous aussi.”
Le soir venu, le maître de la vigne dit à son intendant : “Appelle les ouvriers et distribue le salaire, en commençant par les derniers pour finir par les premiers.”
Ceux qui avaient commencé à cinq heures s’avancèrent et reçurent chacun une pièce d’un denier.
Quand vint le tour des premiers, ils pensaient recevoir davantage, mais ils reçurent, eux aussi, chacun une pièce d’un denier.
En la recevant, ils récriminaient contre le maître du domaine :
“Ceux-là, les derniers venus, n’ont fait qu’une heure, et tu les traites à l’égal de nous, qui avons enduré le poids du jour et la chaleur !”
Mais le maître répondit à l’un d’entre eux : “Mon ami, je ne suis pas injuste envers toi. N’as-tu pas été d’accord avec moi pour un denier ?
Prends ce qui te revient, et va-t’en. Je veux donner au dernier venu autant qu’à toi :
n’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mes biens ? Ou alors ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ?”
C’est ainsi que les derniers seront premiers, et les premiers seront derniers. »

                    

             Deux logiques s’affrontent dans notre parabole : celle du mérite, et celle de la bonté.    Dans la première, l’homme est au centre, avec ses froids critères de justice qui ne laissent aucune place à la bonté, à la générosité. « Je travaille, je fais des efforts et des sacrifices : je mérite donc de recevoir le salaire qui correspond à ma peine. » Dans cette logique, l’homme est seul : il se contemple dans un miroir, lui et son œuvre, et il juge, il se juge, il apprécie, il s’apprécie. Dieu n’a rien à dire sinon à lui donner ce qu’il mérite, ce qui est juste à ses yeux… En fait, ici, c’est l’homme qui décide de tout : Dieu n’a plus qu’une seule chose à faire, obéir…

         Cette recherche de « soi », ne peut que déboucher sur l’autosatisfaction, l’amour propre, l’orgueil et le jugement des autres, sur la base des mêmes critères, des jugements rarement élogieux, souvent méprisants (Lc 18,11-12 ; Jn 7,49)… Loin de rassembler, ils ne font que creuser le fossé et marquer la distance : « Ces derniers venus n’ont fait qu’une heure », et ils reçoivent le même salaire, disent, scandalisés, ceux qui avaient été « embauchés dès le matin ». En fait, ils sont jaloux… « Ils ont travaillé moins que moi, et ils reçoivent autant que moi ! Ce n’est pas juste ! » Ce qui revient à dire à Dieu : « Tu n’es pas juste ! » Et voilà l’homme qui se place au-dessus de Dieu…

          La logique de la bonté ne recherche, elle, que le bien, le bonheur, la joie de l’autre (Jr 32,37-41). Les derniers embauchés n’étaient pas responsables de leur inactivité : « Pourquoi êtes-vous restés là, toute la journée, sans rien faire ?… Parce que personne ne nous a embauchés ! » Leur bonne volonté est bien là, ils n’ont pas cherché à s’esquiver… Et lorsque vient l’heure de la paye, ils ne réclament rien car ils savent qu’ils ne méritent rien ! Mais voilà qu’ils reçoivent comme les premiers ! Bonté du Maître ! Joie !

          Voilà comment agit ce Dieu et Père qui est Amour (1Jn 4,8) en tout son être, et qui ne recherche que le bien le plus profond de tous ceux et celles qu’il aime, envers et contre tout (Mt 5,43-48) et il aime tous les hommes qu’il a créés (Sg 11,24 ; Jn 3,16-17 ; 1Tm 2,3-6) ! Heureux celui qui se tournera de tout cœur, et le plus tôt possible, vers Lui : il ne pourra qu’être comblé et comblé encore (Lc 19,26). Et dans cette logique de l’amour, où nul ne mérite rien, où tout se reçoit gratuitement (Ep 2,4-10 ; Rm 6,23), où chacun ne recherche pas son propre intérêt mais celui de l’autre (1Co 10,24), il se réjouira lui aussi du bonheur de ceux qui, peut-être après lui, à la dernière heure, ont enfin dit « Oui ! » à l’Amour !  DJF

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