« Cela peut paraître curieux », écrit Théophile Penndu dans son livre « Jésus Sauveur », « de proposer comme guide, à ceux qui veulent parvenir au bonheur, un homme qui a été rejeté, qui est mort comme un criminel sur une croix. Mais grâce à leur foi en la résurrection, les chrétiens affirment que Jésus nous sauve, que sa vie n’est pas un échec et qu’elle aboutit à une vie de bonheur sans fin également promise à ceux qui accepteront de vivre comme lui ».
Alors deux discours doivent sans cesse être présents à notre esprit, car avec le Christ, ils ne font qu’un… Jésus, en effet, parlera de « béatitude » tout en évoquant des situations de souffrance…
Lc 6,20-22 : « Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous.
21 – Heureux, vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés.
Heureux, vous qui pleurez maintenant, car vous rirez.
22 – Heureux êtes-vous, quand les hommes vous haïront,
quand ils vous frapperont d’exclusion et qu’ils insulteront
et proscriront votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme.
23 – Réjouissez-vous ce jour-là et tressaillez d’allégresse,
car voici que votre récompense sera grande dans le ciel.
C’est de cette manière, en effet, que leurs pères traitaient les prophètes. »
… et il invitera ses disciples à prendre leur croix à sa suite pour trouver avec elle la joie du salut…
Christ Ressuscité – Basilique de Lisieux
Lc 9,23-24 : Jésus « disait à tous : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix chaque jour, et qu’il me suive. Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi, celui-là la sauvera ».
Lc 14,27 : « Quiconque ne porte pas sa croix et ne vient pas derrière moi
ne peut être mon disciple. »
Jn 15,11 : « Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit complète »…
Autant de situations paradoxales dont le point de convergence est à chercher dans la dynamique de Dieu Lui-même : celle de l’Amour… Et Jésus en fut le plus parfait exemple…
« Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même » (Ste Thérèse de Lisieux)…
Se donner, toujours et partout, pour le bien de l’autre, quelle que soit son attitude à notre égard… « Il est passé partout en faisant le bien » (Ac 10,36-43). Et c’est bien pour notre bonheur que Jésus nous a ainsi parlé, qu’il a vécu avec nous, agi pour nous, nous donnant ainsi l’exemple de l’amour jusqu’à la fin…
« Jésus n’est ni utopiste ni un doux rêveur. Il est l’incarnation d’un Dieu qui est Amour. Il est crédible car il a aimé jusqu’au bout, il a vaincu la haine. Aucune loi, même celle relative au Sabbat, n’a pu l’empêcher de sauver ceux qui en avaient besoin…
La liturgie chrétienne peut ainsi nous parler de « la passion qui nous sauve » car au cours de sa passion, au milieu des pires souffrances, Jésus s’est montré plus fort que toutes les méchancetés ou injustices. Aucune force hostile n’a pu avoir raison de son amour qui va jusqu’à pardonner à ses bourreaux ». « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23,34). « C’est là surtout que nous pouvons vérifier qu’il est sauveur. Grâce à lui, nous savons que nous sommes aimés même si nous ne le méritons pas. Même si nous le renions, son amour à lui restera fidèle et nous permettra de nous relever. Sa manière de vivre est le chemin du salut pour tous les hommes de tous les temps. Ceux qui depuis vingt siècles se sont efforcés de marcher sur ses traces ont pu expérimenter, parfois à travers doutes et inquiétudes, qu’ils s’en trouvaient grandis et qu’ils contribuaient à rendre le monde plus humain ».
En effet, « être sauvé, c’est devenir humain en développant toutes ses potentialités, en refusant de s’enfermer sur soi-même pour s’ouvrir aux autres, en cherchant à progresser toujours davantage. Jésus est justement celui qui a su faire confiance et aimer assez les autres pour qu’ils puissent vivre debout. Au lieu de juger et d’enfermer les gens dans leur passé ou dans leur situation sociale ou religieuse, il a su voir en eux le positif, les possibilités de progrès. Les choix de vie de Jésus visent à libérer l’homme.
On est sauvé quand on se sait aimé. Jésus est habité par une force d’amour : la Présence de Dieu qu’il appelait « mon Père » ou plus familièrement « Abba » (Papa). Il a aimé jusqu’à en mourir. Il a accompli jusqu’au bout la mission de salut qui était la sienne. Croire en quelqu’un, c’est lui faire confiance sans arrière-pensée. Lui déclarer : « Je crois en toi », c’est lui dire : « Je suis sûr que je peux m’appuyer sur toi et que tu ne m’abandonneras jamais. » » C’est ce que Jésus, l’Agneau sans tâche, a vécu, dans la foi, avec son Père. C’est ce que nous sommes tous invités à vivre, nous pécheurs, marqués par la fragilité d’une volonté si souvent vacillante. Mais l’Amour Miséricordieux du Christ ne nous fera jamais défaut, toujours offert pour le meilleur de l’instant présent de notre vie…
Ainsi, « Jésus a indiqué la source du salut : l’amour gratuit et universel de Dieu. Il est des gens qui pensent que si le salut est un don de Dieu, l’homme n’a plus rien à faire. Le Dieu de Jésus n’est pas aliénant, au contraire ! Il est une force de transformation, de libération ; s’ouvrir à son action, c’est entrer dans un mouvement de salut. Le Dieu de Jésus n’est ni le supplément, ni encore moins le concurrent de l’homme. Il propose le salut en offrant son amour, mais pour porter des fruits de salut, cet amour doit être accueilli et mis en œuvre. Etre sauvé, c’est, comme Jésus, vivre avec et de ce Dieu source de toute vie et de tout amour »…
« Père, glorifie ton Fils afin que ton Fils te glorifie » (Jn 17,1)… Père, fortifie ton Fils afin que ton Fils puisse être jusqu’au bout, jusqu’à l’extrême du don de soi (Jn 13,1), le témoin de cet Amour gratuit et inconditionnel de Dieu pour tous les hommes, quels qu’ils soient, quoi qu’ils fassent, puissent-ils tuer sur une Croix le Fils, l’Unique Engendré…
Animé lui aussi par cette Force d’Amour qu’est l’Esprit Saint, Pierre pourra, après la Pentecôte, y puiser le courage d’être à son tour le témoin de cet Amour devant ceux-là mêmes qui ont contribué à faire mourir Jésus… Avec bienveillance, il commencera par les appeler « frères », et puis, il reprendra à son compte une des dernières paroles du Christ sur la Croix. Il avait dit en effet : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »… Et Pierre dira de son côté : « Frères, je sais que c’est par ignorance que vous avez agi ainsi »… Puis, il leur annoncera la Bonne Nouvelle de cet Amour de Miséricorde qui, envers et contre tout, ne désire et ne cherche que notre bien… Ils l’ont tué ? Le Père l’a ressuscité, et il l’a envoyé les bénir et leur offrir le pardon de toutes leurs fautes ! Mais pour le recevoir, ils devront bien sûr se détourner de tout mal… Alors, de ce pardon reçu, pourra renaître une humanité nouvelle où régnera non pas la haine, mais l’Amour, non pas la méchanceté, mais la Bonté… Car tous, par ce pardon, recevront d’avoir part à un Unique Amour, une Unique Bonté, un Unique Esprit qui leur donnera enfin, petit à petit, de s’aimer les uns les autres comme le Christ Lui-même nous a aimés (Jn 15,12)…
Ac 3,17-26 : «Cependant, frères,
je sais que c’est par ignorance que vous avez agi, ainsi d’ailleurs que vos chefs.
18 – Dieu, lui, a ainsi accompli ce qu’il avait annoncé d’avance
par la bouche de tous les prophètes, que son Christ souffrirait.
19 – Repentez-vous donc et convertissez-vous, afin que vos péchés soient effacés,
20 – et qu’ainsi le Seigneur fasse venir le temps du répit.
Il enverra alors le Christ qui vous a été destiné, Jésus…
25 – Vous êtes, vous, les fils des prophètes et de l’alliance
que Dieu a conclue avec nos pères quand il a dit à Abraham :
Et en ta postérité seront bénies toutes les familles de la terre.
26 – C’est pour vous d’abord que Dieu a ressuscité son Serviteur
et l’a envoyé vous bénir,
du moment que chacun de vous se détourne de ses perversités. »
D. Jacques Fournier