« Enthousiasme … peur … calme … »
Pour bien comprendre le texte de ce jour, il nous faut faire un retour en arrière, et voir ce qui s’est passé juste celui-ci : la première multiplication des pains : plus de cinq milles hommes (sans compter les femmes et les enfants) avaient étaient nourris à partir de cinq pains et deux poissons, et tous avaient été rassasiés …
Un miracle qui avait tellement enthousiasmé les gens que tous disaient : « C’est vraiment lui le Prophète annoncé, celui qui vient dans le monde. », et ils voulaient « l’enlever pour faire de lui leur roi. » (Jn 6,14-15), ce que ne voulait pas Jésus, car sa « Royauté n’est pas de ce monde. » (Jn 18,36).
Alors Jésus « obligea les disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait les foules ... [puis] il gravit la montagne, à l’écart, pour prier. ».
Incompréhension des apôtres qui ne comprennent pas l’ordre de Jésus : pourquoi partir sur l’autre rive, en territoire païen, alors que la foule des juifs était prête à l’acclamer comme roi …
Pour eux, c’est une occasion manquée de Jésus pour mettre en place son royaume … alors qu’il avait la foule avec lui … et peut-être aussi pour eux qui se voyaient déjà à des postes importants dans son royaume …
Mais ils obéissent à Jésus, et montent sans la barque …
C’est la nuit qui approche, et bientôt les ténèbres seront là … et en plus, le vent se lève … Pas de quoi rassurer les apôtres pour une traversée qui s’avère difficile …
« Vers la fin de la nuit, Jésus vint vers eux en marchant sur la mer. »
Matthieu aurait pu écrire : « Peu avant que le jour se lève … » … c’est la même chose … mais la symbolique n’est pas la même : ici, on insiste sur la nuit, sur les ténèbres, les forces du mal, alors qu’autrement on insiste sur le jour nouveau, le soleil levant qu’est Jésus …
Et de fait, si Jésus apparaît aux yeux des apôtres, c’est de manière très flou … ils n’arrivent pas à le reconnaître … il faut dire que marcher sur la mer, cela ne se voit pas tous les jours … ils voient une tache blanche qui se meut sur la mer … et les peurs ancestrales refont surface … Un fantôme ? …
Heureusement que Jésus, comme il fait à chaque fois qu’il apparaît de manière impromptue, s’écrit : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez plus peur ! ».
Mais cela ne suffit pas à calmer les apôtres.
Alors, Pierre, bravache comme souvent, dit : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux. ».
« Viens. » dit Jésus.
Au début, pas de problèmes. Pierre regarde Jésus et avance vers lui … il marche sur la mer … mais une bourrasque de vent le déséquilibre, il se rend compte que ce qu’il fait n’est pas ordinaire, il panique … et il s’enfonce dans l’eau …
Alors il remet son regard vers Jésus et l’appelle au secours : « Seigneur, sauve-moi ! ».
Et Jésus lui tend la main …
« Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? » …
Cette phrase ne s’adresse pas seulement à Pierre … mais à chacun de nous … et sans doute plus souvent à nous qu’à Pierre !
Combien de fois nous répondons à l’appel de Jésus, ou à un de ses représentants : « Viens, suis-moi … viens vers moi … fait ceci … fait cela … ».
Et on répond « Oui » …
Au début, cela va bien, on fait ce qu’il nous demande en pensant à Jésus …
Et puis, au bout d’un moment, comme cela va bien, on se regarde soi-même … on est fier de ce qu’on fait … on s’y croit … et on n’oublie de penser que si Jésus n’avait pas été là, avec nous, pour nous soutenir, on n’aurait rien pu faire …
Et comme Pierre, on s’enfonce dans la mer, on s’enlise … rien en va plus.
Notre regard s’est porté sur nous … et non sur Jésus …
Mais Dieu nous laisse toujours une chance, par la voix de l’Esprit Saint qui nous souffle cette parole, celle de Pierre : « Seigneur, sauve-moi ! ».
Alors, nous pouvons prendre la main que Dieu nous tend, celle d’un prêtre, d’un voisin, d’une religieuse … voire celle d’un non-baptisé … pour nous remettre dans le droit chemin …
Ainsi, le vent du Malin tombera … le calme reviendra dans nos cœurs … et nous pourrons voir Jésus sans honte, avec amour.
Seigneur Jésus,
en entendant ce récit,
on pense surtout à Pierre …
Alors que c’est nous qu’il faut regarder.
Quand tout va bien,
on s’en attribue souvent les mérites …
et quand cela va mal …
c’est la faute à pas de chance.
Mais de Toi,
on parle peu !
Francis Cousin
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