LES LETTRES D’IGNACE D’ANTIOCHE

         Ignace – dit Théophore – fut le troisième épiscope d’Antioche, succédant ainsi à Pierre (dont il fut probablement un disciple) et Évode. Né probablement dans la Province de Syrie vers 35, la majeure partie de sa destinée et de sa pensée nous est parvenue grâce à ses Lettres envoyées aux communautés d’Éphèse, de Magnésie, de Tralles, de Philadelphie, de Smyrne et enfin de Rome durant le périple le menant vers le lieu supposé de son martyre. Il fut en effet arrêté et jugé à Antioche puis mené sous escorte à Rome pour y être exécuté dans l’arène sous le règne de l’Empereur Trajan (vers 107).

         Rédigées à la hâte, sans véritable plan, les Lettres d’Ignace représentent pour les historiens mais également pour les croyants un trésor inestimable. Diverses préoccupations s’en dégagent, notamment la réflexion sur l’organisation naissante de l’Église, la fidélité à l’épiscope, la lutte contre les déviances et l’aspiration au martyre dont il ne souhaite pas être délivré. De nombreux débats subsistent encore à l’heure actuelle au sein de la recherche historique quant à l’authenticité de certains de ses écrits, bien qu’ils soient attestés par Polycarpe de Smyrne son contemporain et par Eusèbe de Césarée. Il n’en demeure pas moins que la plus touchante de ces Lettres, celle aux Romains, est considérée de manière unanime comme valable. Ignace y développe son ardent amour pour le Christ et demande aux fidèles de Rome de ne pas intercéder dans le déroulement du dessein divin le concernant. Il s’agit là de l’un des plus anciens témoignages explicites relatifs aux persécutions dont sont victimes les Chrétiens au début du IIè siècle. Parmi les thèmes abordés, on retiendra également la question des « judaïsants », à savoir les croyants persistant dans les usages ancestraux de la Loi de Moïse, ainsi que celle du « docétisme », croyance très ancienne soulignant la divinité du Christ et le refus de sa souffrance charnelle lors de la Passion (croyance encore présente de nos jours dans l’Islam).

         Les Lettres d’Ignace d’Antioche sont une lecture incontournable, que ce soit pour les esprits avides de recherche historique ou pour les cœurs avides de consolider leur foi et ce de manière intemporelle.

Bibliographie élémentaire

  • Ignace d’Antioche – Polycarpe de Smyrne, Lettres – Martyre de Polycarpe, P.-T. Camelot (éd. et trad.), Sources Chrétiennes, Le Cerf, Paris, 2007.

  • R. JOLY, Le Dossier d’Ignace d’Antioche, Bruxelles, 1979.

 

 

Extraits

 

Abstenez-vous de ces plantes vénéneuses (celles de l’hérésie) : Jésus-Christ ne les cultive pas parce qu’elles n’ont point été plantées par le Père… Tous ceux qui appartiennent à Dieu et à Jésus-Christ restent unis à l’évêque ; et tous ceux que le repentir ramène dans l’unité de l’Église appartiendront, eux aussi, à Dieu, pour vivre selon Jésus-Christ.

Aux Philadelphiens 3 1-2.

Je vous en prie, inspirez-vous toujours dans votre conduite, non de l’esprit de discorde, mais de la doctrine du Christ. J’ai entendu dire à certaines gens : « Ce que je ne trouve pas dans nos archives, je ne l’admets pas dans l’Évangile ». Et quand je leur disais : « Mais, c’est écrit », ils me répondaient : « Là est justement toute la question ». Mes archives à moi, c’est Jésus-Christ ; mes inviolables archives, c’est sa croix, sa mort, sa résurrection et la foi dont il est l’auteur. Voilà d’où j’attends, avec l’aide de vos prières, d’être justifié.

Aux Philadelphiens 8, 2.

 

Mon but est de vous mettre en garde contre les bêtes féroces à figure humaine, que non seulement vous ne devez pas accueillir, mais dont vous devez même, si c’est possible, éviter la rencontre, vous contentant de prier pour leur conversion, chose d’ailleurs bien difficile, mais possible pourtant à Jésus-Christ, notre véritable vie. Si c’est seulement en apparence que notre Seigneur a agi, ce n’est aussi qu’en apparence que je suis chargé de fers. Alors, pourquoi me suis-je voué à la mort, par le feu, le glaive, les bêtes ?… C’est pour m’associer à sa passion que j’endure tout et c’est lui qui m’en donne la force, lui qui s’est fait complètement homme.

Aux Smyrniotes 4.

Contentez-vous de demander pour moi la force intérieure et extérieure, pour que je sois chrétien, non seulement de bouche mais de cœur ; non seulement de nom mais de fait, car si je me montre chrétien de fait, je mériterai aussi ce nom, et c’est quand j’aurai disparu de ce monde que ma foi apparaîtra avec le plus d’éclat. Rien de ce qui se voit n’est bon : même notre Dieu, Jésus-Christ ne s’est jamais mieux manifesté que depuis qu’il est retourné au sein du Père. Le christianisme, en butte à la haine du monde, n’est plus objet de persuasion (humaine) mais œuvre de puissance.

Aux Romains 3, 1-2.

Laissez-moi devenir la pâture des bêtes : c’est par elles qu’il me sera donné d’arriver à Dieu. Je suis le froment de Dieu et je suis moulu par, la dent des bêtes pour devenir le pain immaculé du Christ. Caressez-les plutôt, afin « elles soient mon tombeau et qu’elles ne laissent rien subsister de mon corps, mes funérailles ne seront ainsi à charge à personne.

Aux Romains 4, 1-2.

De même que le Seigneur n’a rien fait, ni par lui-même, ni par ses apôtres, sans son Père avec lequel il est un, ainsi, vous non plus, ne faites rien sans l’évêque et les presbytres. C’est en vain que vous essaierez de faire passer pour raisonnable une action accomplie à part vous, faites donc tout en commun : une même prière, une même supplication, un seul et même esprit, une même espérance animés par la charité dans une joie innocente. Tout cela, c’est Jésus-Christ au-dessus duquel il n’y a rien… Accourez tous vous réunir dans le même temple de Dieu, au pied du même autel, en Jésus-Christ un, qui est sorti du Père un et qui demeurait dans l’unité du Père et qui est retourné à Lui.

Aux Magnésiens 7.

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