L’Ordination Episcopale par Elie Pothin

          « Parmi les différents ministères qui s’exercent dans l’Église depuis les premiers temps, la première place, au témoignage de la Tradition, appartient à la fonction de ceux qui, établis dans l’épiscopat, dont la ligne se continue depuis les origines, sont les sarments par lesquels se transmet la semence apostolique. »

                                                           Catéchisme de l’Eglise Catholique, n°1555

          « Pour remplir leur haute mission, « les apôtres furent enrichis par le Christ d’une effusion spéciale de l’Esprit Saint descendant sur eux ; eux-mêmes, par l’imposition des mains, transmirent à leurs collaborateurs le don spirituel qui s’est communiqué jusqu’à nous à travers la consécration épiscopale. »

                                                           Catéchisme de l’Eglise Catholique, n°1556

Qu’est-ce qu’un évêque ?

          L’évêque est un successeur direct des Apôtres. Il est chargé de veiller sur son Église locale, le diocèse, d’assurer la liturgie, l’enseignement de la foi catholique et le service aux plus démunis. Il peut convoquer un synode diocésain pour l’aider à discerner les orientations pastorales pour son diocèse. Il est assisté dans sa tâche par des vicaires généraux et épiscopaux, des conseils, par des diacres et des prêtres, ou même des laïcs, dûment mandatés.

          « Les évêques sont, chacun pour sa part, le principe et le fondement de l’unité dans leurs Églises particulières ; celles-ci sont formées à l’image de l’Église universelle, c’est en elles et par elles qu’existe l’Église catholique une et unique. » Concile Vatican II, Lumen Gentium n°23

Comment sont nommés les évêques ?

          En France, quand un siège est à pourvoir, le Nonce apostolique, représentant du Pape dans le pays propose, après enquête, trois noms à la Congrégation des Evêques*.

Entre ces trois noms ou en dehors d’eux, la Congrégation donne son avis au pape à qui appartient la nomination. L’évêque nommé est libre d’accepter ou de refuser.

       S’il accepte, le gouvernement français est prévenu et quelques semaines lui sont laissées pour faire valoir d’éventuelles objections. Durant tout ce délai, la discrétion est maintenue.

          La nomination est ensuite publiée par le Saint-Siège, toujours à midi.

Quels sont les sacrements que seuls les évêques peuvent administrer ?

       La confirmation, qui peut être déléguée aux prêtres diocésains, mais qui requiert pour l’onction le Saint-Chrême consacré par l’évêque.

 

 

Le sacrement de l’ordre :

ordination diaconale et presbytérale, consécration Épiscopale.

 

 

A la Réunion :

         L’annonce a été faite le 19 juillet à 14 heures par Mgr Gilbert Aubry : l’évêque « nommé » est Mgr Pascal CHANE TEUNG, qui sera ordonné le 15 Octobre 2023 au stade de la Redoute.

 

 

 

Comment se déroule une ordination en France ?

          L’ordination doit être célébrée au cours d’une messe solennelle, de préférence un dimanche, jour de la Résurrection.

          Les prêtres et les fidèles du diocèse sont tous invités à cette messe. C’est par l’Eucharistie que le Christ rassemble son peuple et le nourrit de sa vie ; « l’Eucharistie fait l’Église ».

          L’évêque est à la tête de son diocèse, mais il est aussi en communion avec tous les autres évêques du monde, le collège épiscopal, unis autour du Pape. Pour marquer cette communion, il faut au moins que trois évêques soient présents pour l’ordination d’un nouvel évêque.

          La liturgie de l’ordination est présidée par l’archevêque de la province ecclésiastique dont dépend le diocèse du futur évêque. L’archevêque n’est pas à proprement parler le supérieur hiérarchique des évêques de la province, mais il est chargé d’y veiller à la communion et à ce que la vie de l’Église s’y déroule paisiblement. Deux évêques l’assistent.

A la Réunion :

          La liturgie de l’ordination sera peut-être présidée par le Nonce apostolique et les évêques de la CEDOI et par notre évêque Monseigneur Gilbert Aubry qui prendra ensuite le titre d’évêque « Emérite »

 

 

Accueil et demande de l’ordination

          Au début de la cérémonie, le diocèse est présenté, puis le futur évêque.
Deux prêtres assistent le futur évêque, dont l’un demande à l’archevêque qu’on ordonne le futur évêque, pour la charge de l’épiscopat.

Lecture de la bulle papale

          On ne peut, dans l’Église catholique, devenir évêque sans avoir été nommé par le successeur de l’Apôtre Pierre : le Pape. Après la présentation du diocèse et du futur évêque, « l’archevêque » ou le Nonce apostolique demande qu’on lise la lettre apostolique du Pape, nommant le futur évêque. Puis l’assemblée rend grâce en chantant le Gloire à Dieu.

L’engagement

          Avant d’être ordonné, le futur évêque prend devant toute l’assemblée les engagements au bon exercice de sa mission au nom du Christ.

          Il promet, entre autres, de servir le peuple de Dieu et d’annoncer l’Évangile du Christ, de garder la pureté et l’intégralité du dépôt de la foi selon la tradition reçue des Apôtres, de prendre soin du peuple qui lui est confié et de le diriger sur le chemin du salut, avec les prêtres, les diacres et les collaborateurs de son ministère, d’intercéder sans relâche auprès de Dieu pour le peuple et de remplir de façon irréprochable la fonction de grand prêtre et de pasteur.

Prostration et litanie des saints

          L’ordinand s’allonge sur le sol alors que l’assemblée chante la litanie des saints. Ce rite signifie l’abandon à Dieu en imitant Jésus-Christ, mort et ressuscité et la confiance dans la communion des saints

Imposition des mains et prière d’ordination

          C’est le rite essentiel de l’ordination : l’archevêque impose les mains sur la tête du futur évêque. À sa suite, tous les évêques présents en font de même. Puis « l’archevêque » ou le Nonce apostolique proclame la longue prière d’ordination qui redit le sens de l’épiscopat et demande à Dieu la grâce pour celui qui la reçoit. C’est par ce rite (imposition des mains et prière d’ordination) qui fait l’ordination qu’est transmise la charge que Jésus a confiée aux Apôtres. C’est le geste le plus ancien dans l’Église. Pendant le temps de la prière d’ordination, on tient ouvert au‑dessus de la tête de celui qui est ordonné l’évangéliaire : c’est soumis à la Parole de Dieu que l’Église accomplit sa mission et que le futur évêque devra exercer son ministère d’évêque.

L’onction

          « L’archevêque » ou le Nonce apostolique répand ensuite sur la tête de l’ordonné le Saint Chrême consacré lors de la messe chrismale. Cette onction signifie que l’Esprit Saint le pénètre de sa grâce pour sa nouvelle mission. L’onction marque la configuration au Christ puisque le mot Christ, en grec, signifie celui qui a reçu une onction.

Remise des insignes

          On remet au nouvel évêque des objets caractéristiques de sa mission :

L’évangéliaire qu’il aura la charge d’annoncer, un anneau qu’il portera en signe de sa fidélité à l’Église.

  – La mitre : invitation à mener une vie sainte à la tête de la communauté.

                   – La crosse appelée aussi bâton pastoral : signe de la charge pastorale de l’évêque qui prend soin du peuple de Dieu et le dirige sur le chemin du salut comme un berger prend soin et guide son troupeau.

Le nouvel évêque s’assoit sur la cathèdre

          La cathèdre est le siège de l’évêque. Elle est le symbole de sa mission apostolique. En s’asseyant sur la cathèdre, le nouvel évêque est installé officiellement dans sa cathédrale. Le mot cathèdre a donné son nom à la cathédrale, église mère de toutes les églises du diocèse, celle où l’évêque a son siège.

Le baiser de paix

          Le nouvel évêque échange un baiser de paix avec les évêques présents : ce geste marque l’accueil du nouvel évêque dans le corps épiscopal.

Liturgie eucharistique

          La liturgie eucharistique qui suit est celle de toute messe présidée par l’évêque. Si jusque-là la célébration était présidée par l’archevêque, c’est maintenant le nouvel évêque qui préside la liturgie eucharistique, comme nouvel évêque du lieu. À l’offertoire, le pain et le vin sont apportés par des personnes représentant la diversité des paroisses.

La rencontre de son peuple

          À la fin de la célébration eucharistique, le nouvel évêque va à la rencontre de son peuple qu’il bénit.

 

Le rôle de la congrégation pour les évêques

          À Rome, les « congrégations » sont l’équivalent des ministères dans un gouvernement, mais leurs attributions sont très différentes. La Congrégation des évêques, sous divers noms, existe depuis le XVIe siècle. Elle comporte environ vingt‑cinq cardinaux et archevêques, dont Mgr Michel Aupetit. Certains résident à Rome mais d’autres y viennent à l’occasion. Le préfet de la Congrégation, actuellement le cardinal Marc Ouellet, rencontre très régulièrement le pape pour lui présenter les candidatures, mais le pape reste libre de sa décision. L’absence de publicité évite les pressions et permet des nominations originales.

D’où vient la crosse des évêques ?

          C’est le bâton du berger qui guide son troupeau vers les pâturages : le pedum, ou houlette, ce bâton recourbé dont se servaient les bergers pour attraper le bétail par l’encolure. La comparaison n’est pas anodine, puisque c’est de celui-ci que la crosse épiscopale tire son origine, depuis le bâton que Dieu donne à Moïse pour guider son peuple vers la Terre Promise. Ce n’est qu’au Ve siècle que les évêques se l’approprient, avant de devenir au fil des siècles un attribut incontournable de la charge épiscopale.

          Dans le rite byzantin, la forme de la crosse épiscopale n’est pas tout à fait similaire puisque le bâton se termine en son sommet par deux serpents se faisant face et séparés par une croix pour symboliser les vertus de force et de prudence, ainsi que les serpents confondus par Moïse

          La crosse du pape nommée « férule papale », est quant à elle en forme de croix. Ses deux parties rappellent elles aussi sa fonction symbolique : tandis que le bâton manifeste la gouvernance ecclésiastique de celui qui doit guider les fidèles au salut, le crosseron symbolise le devoir de ramener à Dieu les pécheurs et les égarés, comme le berger saisissant le bétail sans le blesser. La crosse, ici, rappelle précisément le Psaume 22 : « Le Seigneur est mon berger : je ne manque de rien. […] Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure ».

Pourquoi les évêques portent-ils une mitre ?

          La mitre est cette longue coiffe pointue fendue en son milieu et garnie de deux fanons qui retombent sur la nuque.

          La forme de la mitre n’est pas laissée au hasard : comme souvent, dans l’iconographie chrétienne, tout est symbole. Ainsi, les deux pointes, nommées cornes, qui se rejoignent à la base de la coiffe, symbolisent l’Ancien et le Nouveau Testament. Les deux fanons qui tombent dans la nuque dérivent quant à eux des rubans qui servaient autrefois à l’attacher sous la tête. Benoît XVI est le premier à faire figurer la mitre sur ses armoiries papales, qui, jusqu’alors, représentaient la tiare.

          Petit détour par l’étymologie : la mitre viendrait du grec mítra, « ceinture », qui tient lui-même son origine de mítos, c’est-à-dire « fil », qui désignait à l’origine la bande de tissu portée par les guerriers, puis par les femmes dans une fonction ornementale. Si l’on retrouve déjà la mitre dans l’iconographie médiévale, sa forme actuelle vient plus précisément de la tiare, en usage jusqu’au pontificat de Paul VI, en tant qu’accessoire non-liturgique arboré lors des cortèges solennels.

          Elle est aujourd’hui la coiffe la plus imposante dans la hiérarchie ecclésiastique: blanche ou dorée et souvent brodée de fils d’or, voire de pierres semi-précieuses, elle manifeste la splendeur de l’Église que représente la figure de l’évêque.

D’où vient la calotte violette que portent les évêques ?

 

          La calotte, autrefois appelée submitrale, car placée sous la mitre de l’évêque, est cette « petite coiffure, violette pour les évêques, rouge pour les cardinaux et blanche pour le Pape qui couvre le sommet du crâne » nous dit l’Eglise.

          Ce petit couvre-chef circulaire qui épouse la forme du crâne était initialement portée par tous les ecclésiastiques selon la couleur de leur soutane (jusqu’au noir pour le bas‑clergé) et avait une fonction purement pratique puisqu’elle servait à protéger le sommet du crâne du froid après la tonsure.

          Cette tradition, qui disparaît avec le concile Vatican II, quoique toujours d’usage dans certains rares ordres monastiques, voulait que les hommes qui entraient dans les ordres se fassent raser une partie de la tête en forme de cercle pour exprimer leur renoncement au monde.

          La calotte, désormais réservée aux évêques, aux cardinaux et au pape, manifeste leur appartenance à la hiérarchie.

Quelle symbolique pour la calotte ?

          Dans l’Église, les dignitaires portent la calotte à certains moments de la messe, mais la retirent au moment de la Consécration. A chaque autorité sa coiffe et sa couleur : l’évêque porte la calotte violette sous sa mitre, tandis que celle du cardinal, sous sa barrette (ce bonnet rigide quadrangulaire), est rouge. Le blanc est quant à lui réservé au pape, comme le veut la tradition depuis saint Pie V, pape au XVIe siècle.

          Pour Michel Pastoureau, historien de l’art et grand spécialiste de la couleur, son usage vient « du concile de Trente et l’instauration du missel romain de saint Pie V (1570) » (L’Eglise et la couleur, des origines à la Réforme). « Le violet, dont les reflets chatoyants et sombres saturent les yeux, était regardé dans l’Antiquité comme la couleur significative de la royauté, de la puissance, des hautes dignités, de la richesse » explique-t-il en citant La Sainte Messe d’Eugène Vandeur, bénédictin de Maredsous. Il désigne ainsi la dignité hiérarchique de l’évêque, en sa qualité de représentant du pouvoir divin sur terre.

La prière d’ordination d’un évêque

Dieu et Père de Jésus-Christ notre Seigneur, Père plein de tendresse,

Dieu de qui vient tout réconfort,

Toi qui es au plus haut des cieux et qui regardes les plus humbles,

Toi qui connais toutes choses avant même qu’elles soient,

          tout au long de l’ancienne Alliance,

tu commençais à donner forme à ton Église par ta parole de grâce ;

dès l’origine, tu as destiné le peuple issu d’Abraham à devenir un peuple saint ;

tu as institué des chefs et des prêtres et toujours pourvu au service de ton sanctuaire,

car, depuis la création du monde,

          tu veux trouver ta gloire dans les hommes que tu choisis.

Et maintenant, Seigneur, répands sur celui que tu as choisi, la force qui vient de toi,

          l’Esprit souverain que tu as donné à ton Fils bien-aimé, Jésus-Christ,

          l’Esprit qu’il a lui-même communiqué aux saints Apôtres

                    qui établirent l’Église en chaque lieu comme ton sanctuaire,

     à la louange incessante et à la gloire de ton Nom.

Père, toi qui connais le cœur de chacun,

donne à celui que tu as choisi pour l’épiscopat

          de remplir sans défaillance la fonction de grand prêtre

                    et de pasteur de ton peuple saint en te servant jour et nuit.

Qu’il s’emploie sans relâche à intercéder auprès de toi

et à te présenter l’offrande de ton Église.

Accorde-lui, par la force de l’Esprit qui donne le sacerdoce,

le pouvoir de remettre les péchés ainsi que tu l’as commandé ;

Qu’il répartisse les ministères comme tu l’as disposé toi-même,

et qu’il délie de tout lien avec l’autorité que tu as confiée aux Apôtres.

Que sa bonté et la pureté de son cœur fassent de sa vie un sacrifice qui te plaise.

Par ton Fils, Jésus Christ, par qui te sont rendus, à toi, notre Père,

la gloire, l’honneur et la puissance, avec l’Esprit-Saint dans la sainte Église,

maintenant et pour les siècles des siècles.                                                Amen

Pontifical romain pour l’ordination de l’évêque, des prêtres, des diacres, Desclée/Mame, 1996, p. 39-41.

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