« Pendant mon coma, j’ai vu un homme entouré d’une lumière apaisante. »

Alors qu’il était dans le coma, après avoir été grièvement blessé par arme blanche, Emmanuel, un Dionysien de 46 ans, affirme avoir traversé un long tunnel et rencontré un vieil homme baignant dans une lumière apaisante. On lui a refusé l’accès à l’au-delà, mais au vu de ses blessures, son retour parmi les vivants est considéré comme « miraculeux », même au sein du milieu médical.

Emmanuel, 46 ans, se souviendra toute sa vie de cette fameuse journée d’octobre de l’année 2002. A l’époque, il était un jeune homme insouciant, qui se passionnait pour l’humour et le théâtre, ainsi que pour les séries télévisées américaines. En se réveillant ce matin-là, il ne se doutait pas que sa vie allait basculer dans l’horreur… En voulant s’interposer entre deux personnes qui se bagarraient, il a reçu de multiples coups de couteau dans toute la partie haute du corps : deux ont touché le cœur, deux autres un poumon, un le pancréas, un autre le foie… Tous les organes vitaux sont atteints !

« Je n’ai pas réalisé toute de suite que j’avais été blessé à l’arme blanche, confie-t-il. Pendant la bagarre, avec l’adrénaline, j’avais senti comme des coups de poing, pas la lame qui me transperçait… Ce n’est lorsque j’ai vu le sang couler que j’ai compris que j’avais été touché beaucoup plus sérieusement que je ne le pensais ».

Emmanuel n’a pas sombré dans l’inconscience dans l’immédiat. Aidé par les témoins de la scène, il s’est assis sur le sol et a attendu les secours dans cette position.

« J’étais toujours assis quand le Samu est arrivé, poursuit-il. Je n’aurai peut-être pas dû garder cette position car j’avais perdu tellement de sang, que mon corps était devenu rigide et il était impossible de m’allonger sur un brancard pour me déplacer. Dès qu’on me touchait, je hurlais de douleur. Les pompiers qui étaient également présents, ont donc eu l’idée de m’installer sur une chaise pour pouvoir me faire entrer dans le véhicule et c’est ainsi que j’ai été transporté jusqu’aux urgences de Bellepierre. Chaque trou, chaque dos d’âne sur la route étaient un supplice pour moi… »

A l’intérieur du véhicule, on le stimulait pour le garder éveillé, mais une fois aux portes de l’établissement de santé, il a fini par se laisser engloutir par l’obscurité. Transporté en urgence au bloc opératoire, il a subi plusieurs opérations chirurgicales qui ont duré 13 heures. Dans le compte-rendu de l’hôpital que nous a confié Emmanuel, il est d’ailleurs précisé qu’au moment de l’opérer, il avait déjà perdu 3 litres de sang !

AU BOUT DU TUNNEL, LA LUMIERE

Le jeune est ensuite resté dix jours dans le coma. Pendant que les médecins s’évertuaient à le maintenir en vie, lui se souvient d’avoir marché très longtemps dans un tunnel…  « Je ne peux pas dire précisément combien de temps, j’ai marché, si c’était pendant des heures ou des jours… Je sais simplement que ça a duré longtemps, dit-il. Au bout d’un moment, j’ai fini par apercevoir une lumière et là j’ai compris que j’étais arrivé à destination ».

Emmanuel raconte être arrivé dans une salle plongée dans la lumière. A l’intérieur, se tenait un homme qui semblait l’attendre. Il le décrit comme grand, vêtu d’une longue robe blanche et portant de longs cheveux blancs et une longue barbe blanche. Derrière lui, se dressait une immense porte dont les battants en bois étaient entrouverts.

« J’étais incapable de voir ce qu’il y avait au-delà des deux battants, mais la lumière jaillissait de cette porte entrouverte et inondait toute la pièce, assure Emmanuel. Je me sentais tellement bien, apaisé, réconforté… comme si tous mes problèmes avaient cessé d’exister d’un seul coup. »

A côté de l’homme en blanc, il se souvient qu’il y avait une table sur laquelle était posé un livre imposant, « semblable aux gros livres de contes pour enfants, comme on peut voir dans les films », décrit-il. Sans un mot, l’homme qui lui faisait face lui a tendu un stylo et lui a montré le livre des yeux.

« Je savais instinctivement que je devais écrire dedans, dit-il. J’ai pris le stylo et j’ai ouvert le livre, qui n’était rempli que de pages blanches. J’ai voulu écrire quelque chose… Ne me demandez pas quoi, je n’en ai plus la moindre idée ! Mon prénom peut-être… Toujours est-il que je n’ai pas pu inscrire quoi que ce soit : le stylo ne fonctionnait pas ! Je l’ai rendu au vieil homme, qui s’est aussitôt évaporé sous mes yeux. En même temps, les battants derrière lui se sont refermés. Une immense tristesse s’est abattue sur moi, car j’avais vraiment envie de passer cette porte. Une image s’est alors imposée à moi : celle de ma mère et de ma sœur, toujours vivantes, assises côte à côte sur un banc. C’est à ce moment-là que je me suis réveillé et que je suis sorti du coma. »

L’HOMME EN BLANC : SAINT-PIERRE ?

Plus tard, sa sœur lui apprendra que, pendant qu’il était dans le coma, elle venait avec leur mère lui rendre visite à l’hôpital. Toutes deux avaient l’habitude de s’asseoir un moment sur le banc de la cour devant l’entrée principale, en attendant l’autorisation d’accéder à la chambre. Depuis, il en est convaincu : c’est pour qu’il reste aux côtés de ces deux femmes très dépendantes de lui, qu’il n’a pas été autorisé à gagner l’au-delà. C’est lui en effet, qui s’occupe de leurs courses, qui gère toutes leurs démarches administratives… « Si on m’avait laissé le choix, je ne serais pas revenu, avoue-t-il. Ce monde est redoutable et je me sentais si bien, si heureux là où j’étais… »

Après son réveil, Emmanuel est resté un mois supplémentaire à l’hôpital. Pour le personnel soignant qui s’est occupé de lui, son cas relevait tout simplement d’un miracle. « Même les médecins qui m’avaient opéré n’en revenaient pas de me voir si bien portant, dit-il. Ils me disaient qu’avec toutes les blessures que j’avais reçues, il était extrêmement improbable que j’en ressorte vivant. »

A sa sortie, le jeune homme a quand même été contraint de suivre des séances de rééducation chez le kinésithérapeute, notamment pour récupérer en capacités pulmonaires. Le professionnel exerçant à côté d’une église, il s’est un jour décidé à passer les portes de la bâtisse pour discuter de ce qu’il avait vécu pendant qu’il était dans le coma avec un prêtre. « Je n’arrêtais pas de penser à ce vieil homme en blanc et je me demandais ce que ça pouvait signifier, explique-t-il. Comme beaucoup de Réunionnais, je suis né dans une famille catholique, j’ai été baptisé… mais je n’ai jamais été un fervent pratiquant. A l’adolescence, j’en avais même tellement marre de ces histoires avec Jésus, que je ne suis pas allé au bout du catéchisme. J’ai donc rencontré ce curé en n’ayant aucune référence religieuse. Au début j’avais peur de m’ouvrir à lui, car je me disais qu’il allait me prendre pour un fou. Finalement, après m’avoir écouté attentivement, il m’a avoué que j’étais la deuxième personne au cours de toutes ses années de sacerdoce, à lui rapporter une telle histoire. Il m’a aussi indiqué que dans la religion catholique, cet homme en blanc qui fait passer les défunts par les portes du paradis est traditionnellement regardé comme étant Saint Pierre.

On peut aussi penser au récit de l’apparition à St Jean du Christ Ressuscité, les deux interprétations ne pouvant qu’être complémentaires. Le Christ, en effet, est l’Unique « Sauveur du monde » (Jn 4,42), l’Unique Médiateur entre Dieu et les hommes : « Voilà ce qui est bon et ce qui plaît à Dieu notre Sauveur, lui qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. Car Dieu est unique, unique aussi le médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus, homme lui-même, qui s’est livré en rançon pour tous » (1Tm 2,3-6).

Lisons quelques extraits de ce récit ouvrant le Livre de « l’Apocalypse de Jésus Christ, Ἀποκάλυψις Ἰησοῦ Χριστοῦ, apokalupsis Iêsous Khristou », ce qui, dans la langue du Nouveau Testament, le grec, signifie : « Révélation de Jésus Christ » (Ap 1,1)…

               « Moi, Jean, votre frère, partageant avec vous la détresse, la royauté et la persévérance en Jésus, je me trouvai dans l’île de Patmos à cause de la parole de Dieu et du témoignage de Jésus. Je fus saisi en esprit, le jour du Seigneur, et j’entendis derrière moi une voix forte, pareille au son d’une trompette. Elle disait : « Ce que tu vois, écris-le dans un livre et envoie-le aux sept Églises : à Éphèse, Smyrne, Pergame, Thyatire, Sardes, Philadelphie et Laodicée. »

               Je me retournai pour regarder quelle était cette voix qui me parlait. M’étant retourné, j’ai vu sept chandeliers d’or, et au milieu des chandeliers un être qui semblait un Fils d’homme, revêtu d’une longue tunique, une ceinture d’or à hauteur de poitrine ; sa tête et ses cheveux étaient blancs comme la laine blanche, comme la neige, et ses yeux comme une flamme ardente ; ses pieds semblaient d’un bronze précieux affiné au creuset, et sa voix était comme la voix des grandes eaux ; il avait dans la main droite sept étoiles ; de sa bouche sortait un glaive acéré à deux tranchants. Son visage brillait comme brille le soleil dans sa puissance.

               Quand je le vis, je tombai à ses pieds comme mort, mais il posa sur moi sa main droite, en disant : « Ne crains pas. Moi, je suis le Premier et le Dernier, le Vivant : j’étais mort, et me voilà vivant pour les siècles des siècles ; je détiens les clés de la mort et du séjour des morts. Écris donc ce que tu as vu, ce qui est, ce qui va ensuite advenir. Quant au mystère des sept étoiles que tu as vues sur ma main droite, et celui des sept chandeliers d’or : les sept étoiles sont les anges des sept Églises, et les sept chandeliers sont les sept Églises » (Ap 1,9-20).

UNE VIE APRES LA MORT

               Lui qui n’avait jamais été vraiment porté sur la religion s’est satisfait de ces explications. Et a retrouvé foi en l’église. « Jusque-là, je ne m’étais jamais posé de questions sur une possible vie après la mort, dit-il. Je menais ma petite existence comme tous les jeunes de mon âge, sans me soucier de ce genre de préoccupations. Cette E. M. I. (expérience de mort imminente, NDLR) m’a ouvert les yeux sur le monde et ma vie. J’ai conscience que, pour certaines personnes, ce que j’ai vécu ne peut-être réel. Elles diront que j’ai rêvé, trouveront une explication rationnelle… Mais moi, je sais que la vie ne s’arrête pas l’arrêt du cœur et qu’il y autre chose après la mort. Je ne vais rien faire pour la précipiter, mais maintenant je l’attends avec sérénité. Et cette fois, j’espère que je passerai cette porte ! »

               Depuis cette expérience, Emmanuel s’évertue à faire le bien autour de lui, à ne plus commettre de mauvaises actions envers autrui…  « J’ai ma théorie sur ce tunnel que nous devons traverser avant d’arriver à la lumière, explique-t-il. Je pense que plus on a de choses à se faire pardonner, plus on erre dans l’obscurité. Donc, depuis, je fais tout pour être quelqu’un de bien qui fait de bonnes actions. » 

Article paru dans le Journal de l’ïle du Dimanche 29 novembre 2020.

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